stdClass Object ( [id] => 18577 [title] => Et le souffle s’est transformé en alléluia [alias] => et-le-souffle-s-est-transforme-en-alleluia [introtext] =>L'âme et la cithare/31 - Adam gardien de toute la terre donne enfin la parole à la Terre et à l'univers
par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 01/11/2020
« Amour, toi qui m'as formé à l'image du Dieu sans visage, Amour toi qui m'as tendrement recomposé après ma ruine, Amour, voici que je me rends : je serai ta splendeur éternelle. »
David Maria Turoldo, Les Psaumes
C’est ici que se conclut aujourd'hui le commentaire des Psaumes. Et il se termine par une louange, une hymne cosmique à Dieu. Une immense action de Grâce.
« Alléluia ! Louez Dieu dans son temple saint, louez-le au ciel de sa puissance ; louez-le pour ses actions éclatantes, louez-le selon sa grandeur ! Louez-le en sonnant du cor, louez-le sur la harpe et la cithare ; louez-le par les cordes et les flûtes, louez-le par la danse et le tambour !Louez-le par les cymbales sonores, louez-le par les cymbales triomphantes ! Et que tout être vivant chante louange au Seigneur ! Alléluia ! » (Psaume 150).
[fulltext] =>Alléluia est le dernier mot du Psautier. Il débutait par "Heureux est l’homme" (1, 1) et se termine maintenant par Alléluia (150, 6). Il commence par une louange de Dieu à l'homme, il se termine par la louange de l'homme à Dieu (Alleleu-Yah : nous louons YHWH). Pour nous dire que toute notre vie est circonscrite par un "bienheureux" et un "alléluia". Le Livre des Psaumes est aussi une métaphore de l'existence humaine, sillonnée par les bénédictions, les joies, les peines, les cris, les malédictions, les louanges, pour arriver enfin à l'alléluia, qui est parfois aussi le dernier mot de la vie ; celui qui suit l'Amen, car s'il est déjà très beau de quitter cette terre avec un doux "ainsi soit-il", il est encore plus beau de la quitter avec un alléluia, avec une ultime et infinie gratitude.
Les Juifs appellent le Psautier le "Livre des louanges", celui de la louange à Dieu et de la louange à l'homme, qui toutes deux traversent les Psaumes. Car s'il est vrai que l'homo sapiens est un animal qui a besoin de louange, la Bible nous dit que Dieu éprouve aussi ce même besoin qu'il satisfait dans le Livre et ensuite avec l'Incarnation - "Je te loue, ô Père, car...". "Louez-le" est répété dix fois dans ce psaume. Comme les dix "Et dit" de la Genèse (ch. 1), comme les dix commandements donnés à Moïse sur le Sinaï. La louange est une autre loi, qui ne nous sauve pas en raison de nos actions ni de nos mérites, mais seulement parce que nous pouvons dire un dernier alléluia, et recevoir le même salaire que les justes.
La louange est aussi une nouvelle création. Si Dieu a créé le monde en le nommant et continue à le créer à chaque instant par sa parole sans cesse répétée, nous qui sommes faits à son image, nous créons notre monde avec nos mots, en le nommant, en le bénissant ou en le maudissant. Nous le créons et le recréons chaque matin, quand nous nous levons : à la maison nous prononçons (si nous les disons, et comment nous les disons) les noms de ceux que nous aimons ; et puis nous prononçons ceux de nos collègues, de nos amis, jusqu'au nom inconnu de ceux que nous rencontrons rapidement dans les magasins ou les bars. La louange est un mot performant, qui a la capacité de changer la réalité dont elle fait l'éloge. Lorsque nous louons Dieu, nous le rendons plus beau et plus splendide (au moins dans notre âme), et lorsque nous louons une personne, nous la rendons plus belle et meilleure (et pas seulement dans notre âme). Mépriser un homme ou une femme est chose mauvaise, les maudire avec des mots est toujours un acte très grave, ceux qui louent Dieu tout en méprisant les êtres humains pervertissent la louange et la prière. En louant ce Dieu qu’ils ne voient pas sans louer son image qu’ils voient, ils renient son image.
Celui qui loue Dieu devrait apprendre à louer les hommes, il devrait faire le tour du monde en bénissant chaque femme et chaque homme qu'il rencontre, car il sait que ce Dieu qu’il a loué dans le temple le voit réellement le long des routes. Cette louange entre humains est l'un des plus beaux exercices anthropologiques sous le soleil. On y trouve aussi les flatteries du souteneur, très fréquentes, qui ne sont jamais vraies et ne produisent rien de bon, ce qui aggrave la situation de celui qui s’y adonne et de celui qui les accueille. Elles répondent au besoin de reconnaissance des autres en singeant une véritable estime: cette tromperie conduit à maintenir ces personnes dans les pièges d’une parfaite exploitation. Mais il y a aussi sur terre une louange sincère, celle qui, à certains moments décisifs de la vie, perçoit chez l'autre au moins un signe authentique de bonté et de beauté - car il y en a toujours un : c'est notre être fait à l'image de Dieu, qui est plus tenace que tous les gribouillages que nous faisons au cours de la vie. Il sait comment la trouver, il n'arrête pas de fouiller tant qu’il n’a pas atteint la perle cachée, et alors il la loue, et utilise les plus belles expressions qu'il a apprises pour vanter ses qualités. Combien de souffrances se dissiperaient sur terre si nous étions capables d’une authentique louange. Celle-ci est un remarquable entraînement à vivre la bonté car il demande constance, patience et douceur : savoir se rapporter à l’autre, respecter ses temps et ses habitudes. Une seule personne capable de cette louange peut sauver toute une communauté, c'est le juste qu'Abraham cherchait à Sodome et qu'il n'a pas trouvé (Gn 18). Nous, au contraire, nous le trouvons parfois, et nous savons ce qu'il vaut. Voilà pourquoi la louange est un bien commun mondial, un patrimoine civil de chaque communauté. Louer - Dieu et les humains - nous rend tous meilleurs, y compris ceux qui ne savent pas louer.
Il n'est pas difficile de reconnaître ceux qui pratiquent la louange. Il sont capable de faire silence, ils savent écouter, se réjouir, pleurer, ils ont un grand capital émotionnel, ils s’émeuvent en présence d’une souffrance, et aussi devant ce qui est beau, ils sont humbles et toujours reconnaissants.
Ce dernier psaume, ainsi que les quatre autres psaumes de l'alléluia, est une louange à la musique et au chant. Il passe en revue les instruments de musique, qui sont ainsi élevés à une grande dignité. Qui sait comment et sur quelle référence biblique, a-t-on pu au Moyen Age dévaloriser les musiciens, ou qui sait comment il est venu à l’esprit de la Réforme protestante d’interdire la musique sacrée ? Ces psaumes font également l’éloge des fabricants d'instruments de musique, des artisans, des luthiers et de toute la grande famille des musiciens d'orchestre et de ceux qui travaillent dans le monde de la musique. Grâce à ces psaumes, la musique fait partie des langages de Dieu, c'est une des langues au moyen desquelles les anges communiquent avec nous et entre eux, la musique est devenue Parole. Et chaque fois qu’une musique est jouée sur terre, il se peut qu’au ciel, Dieu se réveille, se retourne et l’écoute avec intérêt.
Il n'est pas improbable que ce psaume ait été composé, ou du moins chanté, pendant l'exil babylonien. Un éloge des chants, des musiciens et des chœurs du temple quand le temple n'était plus là, parce que détruit. Mais ils étaient restés vivants dans l'âme du peuple, de sorte que ce manque a produit une richesse merveilleuse, qui nous est revenue vivante parce que purifiée de toute force et de tout pouvoir. La beauté de ces psaumes de louange réside dans leur sobriété essentielle.
« Tout être qui respire loue le Seigneur. » On ne pouvait pas trouver une conclusion plus belle que celle-ci. L'éloge des êtres humains s'étend à toute la création, aux animaux, aux plantes, à tout ce qui est vivant. En conclusion, cette fraternité cosmique qui nous a accompagnés au cours de ces mois revient vers nous. Pour la Bible la louange humaine est essentielle, mais c’est trop peu. Aussi voit-on ici Adam, gardien de toute la terre, qui donne la parole à la louange de la Terre et de l'univers.
Il y a aussi une louange à la vie, un alléluia du souffle. Nous sommes trop habitués à une vision volontariste de la foi, plus stoïque (et pélagienne) que chrétienne, qui nous amène continuellement à penser que la vie spirituelle est une question d'effort, d'engagement, de volonté, qu’elle relève entièrement de nous. Puis nous lisons les Psaumes, nous arrivons à ce dernier verset et découvrons une autre dimension de la foi. La première louange, c'est nous, et nous en tant qu'êtres vivants et créés, qui respirent, qui ont encore ce souffle infusé au premier jour de la création et jamais retiré : « La gloire de Dieu, c’ est l'homme vivant » (Saint Irénée). Nous le sommes comme et davantage que les œuvres d'art qui sont la première louange de l'artiste.
Ensuite, ce subjonctif - "qu’il loue" - peut être conjugué à l'indicatif : tout être qui respire loue le Seigneur. La louange la plus importante est celle que nous sommes, et non celle que nous disons. Nous pouvons adresser des louanges parce que, d'abord, à un niveau plus profond et plus vrai, nous sommes louange. La naissance d'un enfant, la beauté d'une jeune fille, la dignité d'un vieil homme, un acte de loyauté, un ami, sont par eux-mêmes louange. Alors la bonne nouvelle est que sur terre la louange est bien plus vaste que celle que nous prononçons. Elle devient ensuite immense si l'on y ajoute la louange des oiseaux, de la biche, de la baleine, de l'arbre et de la feuille, jusqu'à rejoindre l'infini des étoiles, et clarite et pretiose et belle. C'est une louange silencieuse, apaisante, douce - quoi de plus doux qu'un bouleau ou que les yeux d'un chien ? - qui nous rappelle à tous la dimension silencieuse, apaisante et douce de nos louanges. Pour cette louange cosmique et séculaire, le temple est une forêt, un bureau, le cœur d'un pinson, la mer, une galaxie. Les réalités les plus importantes de la vie ne sont pas créées par nos actions ni même par nos paroles. Tout simplement elles sont. Nos créations sont précieuses, parfois presque essentielles. Mais ce qui est vraiment essentiel, c'est ce qui est, c'est ce que nous sommes, c'est vie dans son essence. Parce que nous sommes enveloppés d'un amour infini, mais nous ne le savons pas. Alléluia !
C'est ainsi que nous terminons le commentaire du Livre des Psaumes. Nous l’avons engagé lors du premier confinement, et nous le concluons dans une phase tout aussi incertaine. J'ai choisi, en mars, de commenter les Psaumes parce que je croyais que le Psautier, avec ses louanges et ses prières, était un bon compagnon pour le dur voyage qui nous attendait. J'espère qu'il en a été ainsi, au moins un peu. Ce fut certainement le cas pour moi. Cette fois-ci aussi, comme pour les neuf autres livres bibliques commentés ces années dernières pou le journal "Avvenire", je sors transformé par ce parcours, marqué dans ma chair et dans mon nom. Chaque commentaire a été et reste un combat avec l'ange, dont je sors avec une bénédiction et une blessure. Ensemble nous avons appris ou réappris à prier, nous avons compris que la louange et la prière bibliques étaient différentes de ce que nous pensions, et qu’ elles étaient merveilleuses.
Merci à vous tous, lecteurs, pour les courriers électroniques que vous m'avez adressés, une des joies les plus profondes de ce travail. Merci, encore une fois, et toujours plus, à Marco Tarquinio, à qui j'ai consacré tous les samedis après-midi, pendant des années, la lecture, le titrage (les titres sont presque toujours les siens), la correction de mon article, qui est toujours plus long qu'il ne devrait l'être. Sans cette réciprocité risquée et féconde, je n'aurais pas commencé ce nouveau "métier" étrange de commentateur de la Bible en tant qu'économiste, un métier qui a changé ma vie.
Je remercie, au nom de beaucoup, Luigino Bruni, qui sait combien, année après année, les titres de ses textes font de plus en plus partie de notre travail commun. Et il est bon que les lecteurs sachent qu’évidemment nous poursuivons ensemble notre parcours. (mt)
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Publié sur Avvenire le 01/11/2020
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David Maria Turoldo, Les Psaumes
C’est ici que se conclut aujourd'hui le commentaire des Psaumes. Et il se termine par une louange, une hymne cosmique à Dieu. Une immense action de Grâce.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 25/10/2020
« Les justes, en qui le Seigneur a créé le besoin désespéré de joie, auront de la joie. »
Sergio Quinzio, Un commentaire sur la Bible
Il y a une joie unique en son genre, qui ne peut naître que d'une certaine pauvreté. Les psaumes et les prophètes en témoignent, et la liturgie nous le rappelle chaque jour.
La joie n'est pas seulement un besoin désespéré de chaque être humain, c'est aussi un droit. Un droit qui n'est inscrit dans aucune charte constitutionnelle mais dans l'âme des personnes et des peuples. Un droit fondamental qui doit être défendu surtout en période de grande crise, lorsqu'il est menacé au point d’être nié. Chaque empire, et pas seulement l'empire égyptien au temps de Moïse, essaie de nier le droit à la fête de ses sujets, parce que la tentation de nier le droit à la joie est trop forte pour tuer l'espoir d’un autre avenir : il n’y réussit jamais complètement, mais il s’y complaît toujours et avec ténacité. Mais il y a aussi un devoir de joie, et c'est un devoir essentiel. Car lorsque la joie disparaît dans une communauté ou une société, l'espoir et la foi en la vie disparaissent avec elle. Il y a, parfois, plus d'amour à conserver la dernière joie qu’à supporter l’épreuve, parce qu'une joie qu’on préserve contre l’avancée de la tristesse des années et des événements est un bien collectif, c'est une bénédiction pour tous : c'est une façon proclamer résolument que nous sommes plus grands que notre destin.
[fulltext] =>Habituellement, ce sont les enfants et les jeunes qui procurent ce bien particulier aux familles et aux communautés, mais là où il fait défaut, il faut des "Cyrénées de la joie", des adultes qui soient les gardiens de cette flamme, qui par amour jouent ce rôle que les enfants assument naturellement ; avec une différence : la joie toute empreinte d’agapè des adultes et des personnes âgées a un parfum de paradis et a peut-être plus d’impact sur ceux qu’elle touche. Cette joie biblique, très semblable à la laetitia (de laetus : fumier : fertilité), n'est donc pas simplement le bonheur, et le droit à cette joie n'est pas non plus « la quête du bonheur » de la Déclaration de Philadelphie de 1776. Cette joie ne fait pas l’objet d’une recherche mais on l’apprécie beaucoup lorsqu'elle arrive sans qu’on la cherche parce que nous étions tous occupés à rechercher le bonheur des autres. On la conserve précieusement, comme un cadeau, comme l’ultime gorgée de la dernière bouteille de vin de la réserve laissée par un aïeul, comme une bague de mariage. Ce n'est pas la gaieté, car cette joie ne se manifeste pas par de nombreux sourires. Il n'en faut qu'un, mais quand il survient, il transperce le ciel et nous fait entrevoir quelque chose de Dieu.
La liturgie est un exercice collectif pour conserver la joie. C'est une pratique communautaire qui garantit qu’elle ne manque pas dans la communauté même lorsque, individuellement, personne ne la possède plus, ou ne la possède pas encore. Même en ces jours où personne n'a gardé ni trouvé de raison pour célébrer la joie, on entre dans le chœur, on ouvre le livre des Psaumes, on entonne un cantique et la joie naît sur le néant de nos joies individuelles. Comme tous les cadeaux, la joie liturgique peut ne pas être accueillie ; mais, comme tous les cadeaux, ce don refusé demeure comme tel : il reste là, vivant, et d'une manière mystérieuse, il agit et transforme. Cette joie est un bien commun, dont personne n'est maître, que personne ne produit seul, mais elle est au service et veut le bien de tous ; elle doit être protégée par tous si l’on veut qu’elle continue à vivre. La liturgie est donc un multiplicateur de la joie dans le monde ; c'est un dispositif qui la rend chaque jour plus grande que la somme des joies individuelles des femmes et des hommes. La liturgie, en particulier la liturgie des heures et la prière des psaumes, est le don d'une joie par procuration, c'est la manne de la joie quand nous avons épuisé le pain dans le désert. C'est un autre type d’opus operatum (cad une action par elle-même efficace) qui garantit une présence joyeuse dans nos communautés même lorsque, par négligence ou à cause de quelque épreuve, nous n'en serions pas individuellement capables. Si nous sommes fidèles à la liturgie, sa joie ne manque pas d’être à ce rendez-vous, même lorsque nous l'accueillons dans les larmes.
Il existe une joie unique en son genre, qui ne peut naître que d'une certaine pauvreté...
Les psaumes et les prophètes en témoignent, et la liturgie nous le rappelle chaque jourIl en est ainsi depuis des millénaires, et il en sera ainsi tant qu'il y aura sur Terre une communauté capable de chanter la joie ; tant qu'il resra un homme ou une femme capables d’entonner un psaume, car la Bible n'offre pas seulement un répertoire de paroles lorsque nous avons épuisé les nôtres ou que nous ne les avons pas encore trouvées ; c'est aussi le don d’une joie qui remplace les nôtres et les multiplie. Les psaumes porteurs de joie sont toujours les bienvenus, mais surtout lorsque nous sommes devenus des mendiants de la joie, lorsque nous traversons un désert où seuls nous n'aurions plus la force de chanter. Oh que le monde serait moins heureux sans les Psaumes…
« Alléluia ! Chantez au Seigneur un chant nouveau, louez-le dans l'assemblée de ses fidèles !
En Israël, joie pour son créateur ; dans Sion, allégresse pour son Roi !
Dansez à la louange de son nom, jouez pour lui, tambourins et cithares !
Car le Seigneur aime son peuple, il donne aux humbles l'éclat de la victoire.
Que les fidèles exultent, glorieux, criant leur joie à l'heure du triomphe. » (Psaume 149, 1-5).Un cantique nouveau. C'est l'hymne à la joie, l'avant-dernier des cinq Chants de l'Alléluia qui clôt le Psautier. Un psaume écrit selon toute probabilité après l'Exil, lorsque ce "petit reste" revenu de Babylone a dû réapprendre la foi en son Dieu. Et il a commencé par la joie, car après les longs exils, la foi ne peut que renaître : quand l'exil se termine, on ne "retourne" pas à la foi d'une époque, on "avance". Israël avait tout fait pour ne pas perdre la foi des patriarches, de Moïse et des prophètes, mais lorsqu’il est rentré au Pays, cette foi d’antan ne pouvait avoir un avenir qu'en ressuscitant. Les passions et les Golgotha ne suffisent pas pour continuer à vivre. Il ne suffit pas de se souvenir, de faire mémoire et de chérir le passé : il faut une nouvelle alliance, une nouvelle promesse. Et donc une nouvelle joie, qui est la première énergie des recommencements, la première ressource quand, après l'exil, il faut trouver de nouvelles raisons pour continuer la course.
C'est pourquoi dans ce psaume se fait entendre haut et fort la voix de celui qu’on appelle le Troisième Isaïe, ce prophète anonyme qui a vécu juste après l'exil babylonien, auteur des derniers chapitres (56-66) du livre d'Isaïe, grand chantre de la nouvelle promesse et de la résurrection du peuple après l'Exil. Ce prophète, grand comme prophète et immense comme poète, n'a pas célébré la joie et l'espoir parce qu'il n'a pas vu les péchés et les maux de son époque. Au contraire, il les voyait très bien et les dénonçait avec force. Mais la nécessité d’entretenir la joie était plus forte, car les prophètes savent que sans une nouvelle joie, on ne rebondit pas après un exil. L'auteur de ces psaumes de joie, qui fut peut-être un disciple direct ou indirect de ce grand prophète, a fait le même exercice, il a entonné le même chant.
Les prophètes sont les premiers dispensateurs de la joie biblique, et ils nous révèlent sa nature et son mystère. Ils nous disent que c'est une joie différente. Lorsque nous pensons à Isaïe, Osée ou Jérémie, nous ne pensons pas à des personnages joyeux ni à des bons-vivants. Au contraire, la tradition et leurs textes nous renvoient d’eux une image grave et très sérieuse. Pourtant, les prophètes, tous les vrais prophètes, sont des « sages-femmes » de la joie. Ils le sont précisément parce qu'ils démasquent les illusions de chacun, en particulier celles des communautés en grande crise, lorsqu'un besoin désespéré de joie devient plus fort, souvent invincible, si désespéré que la demande génère l'offre - celle des faux prophètes, distributeurs professionnels de fausses-joies à bon marché. Les vrais prophètes ne nous offrent pas les fausses joies qu'ils ne possèdent pas. Ils ne peuvent nous offrir que la seule qu'ils connaissent, celle qui naît pendant et après les exils, celle qui n'a rien de gai tout en étant pleinement joyeuse. Leur terre promise est celle du non-encore, non pas parce qu'ils sont producteurs d'utopies mais parce qu'ils sont, tout simplement, d'honnêtes prophètes. Et le prophète est le héraut du non-encore, parce qu'aucune "terre du déjà" ne le satisfait, parce que chaque déjà est toujours inférieur à la promesse, laquelle commence pourtant dans ce petit déjà insatisfaisant, mais qu’il apprécié alors même qu’il lui annonce son non-encore.
C'est une joie semblable à celle de la Cabiria de Federico Fellini, quand après les tragédies et la méchanceté des autres, la dernière scène est consacrée à la musique et nous livre le sourire différent qui émerge sur les lèvres d'une femme pauvre et trompée, pour célébrer à nouveau la joie de vivre, pour y croire malgré tout. Les prophètes nous disent que nous mourons cent fois, mais que cela fait partie de la condition humaine que de ressusciter cent fois, et que la dernière fois une autre main nous ressuscitera : nous comprendrons alors que cette main avait agi aussi lors des cent autres résurrections, mais nous ne le savions pas : c'est la "main invisible", la plus importante sur terre.
Enfin, le Psaume 149 est le chant des pauvres, les anawim de YHWH. Parmi les nombreuses joies inachevées de la Bible et de la vie, celle des pauvres est la plus sublime et la plus étonnante. C'est une joie que nous pouvons voir même aujourd'hui, si nous avons le grand don d'être amis avec les pauvres. L'Esprit Saint - nous dit la tradition - est "le père des pauvres". Il l'est aussi parce qu'il les nourrit d'une joie différente de la nôtre, à savoir que nous ne sommes pas pauvres (même si, de plus en plus, nous aimerions le devenir). C'est la joie la plus proche de celle annoncée par les Psaumes, de celle qui a besoin de l'exil, de celle qui sait que tôt ou tard la libération viendra, et qu’ elle a peut-être déjà commencé.
J'ai eu dans ma vie la grâce d’assister à des psaumes chantés par des communautés de pauvres. S'il y a un paradis - et il doit y en avoir un - les chants et les harmonies y seront très semblables à celles que j'ai entendues lors de ces rencontres. Où la joie ne naît pas parce qu'on a l'illusion que cette pauvreté va bientôt disparaître, mais parce qu'on se sent aimé et sauvé dans cette pauvreté. Les pauvres qui savent louer, triomphent de la malédiction de la pauvreté et parviennent à l'appeler "sœur". Et là commence une libération, parfois de la malédiction de la misère, mais elle ne doit pas devenir une libération de la joie, de la joie parfaite que procure la pauvreté.
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Il y a une joie lors des fêtes des pauvres que les riches ne connaissent pas, et cette ignorance est l'une de leurs plus grandes pauvretés. Ceux qui connaissent et vivent avec les pauvres ont goûté à cette joie et ne l'ont plus jamais oubliée : « C'est la fierté de ses fidèles. Alleluia » (149, 9).L'âme et la cithare/30 - La vraie liberté, c'est être affranchi de la misère, et non pas de la « joie parfaite » de la pauvreté.
par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 25/10/2020
« Les justes, en qui le Seigneur a créé le besoin désespéré de joie, auront de la joie. »
Sergio Quinzio, Un commentaire sur la Bible
Il y a une joie unique en son genre, qui ne peut naître que d'une certaine pauvreté. Les psaumes et les prophètes en témoignent, et la liturgie nous le rappelle chaque jour.
La joie n'est pas seulement un besoin désespéré de chaque être humain, c'est aussi un droit. Un droit qui n'est inscrit dans aucune charte constitutionnelle mais dans l'âme des personnes et des peuples. Un droit fondamental qui doit être défendu surtout en période de grande crise, lorsqu'il est menacé au point d’être nié. Chaque empire, et pas seulement l'empire égyptien au temps de Moïse, essaie de nier le droit à la fête de ses sujets, parce que la tentation de nier le droit à la joie est trop forte pour tuer l'espoir d’un autre avenir : il n’y réussit jamais complètement, mais il s’y complaît toujours et avec ténacité. Mais il y a aussi un devoir de joie, et c'est un devoir essentiel. Car lorsque la joie disparaît dans une communauté ou une société, l'espoir et la foi en la vie disparaissent avec elle. Il y a, parfois, plus d'amour à conserver la dernière joie qu’à supporter l’épreuve, parce qu'une joie qu’on préserve contre l’avancée de la tristesse des années et des événements est un bien collectif, c'est une bénédiction pour tous : c'est une façon proclamer résolument que nous sommes plus grands que notre destin.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 18/10/2020
"« L'interdiction des images était un précepte capital qui serait fatalement violé. Tout d'abord par YHWH lui-même, qui avait façonné l'homme "à notre image et à notre ressemblance". YHWH avait voulu créer un être à sa propre image – et à son tour, cet être aurait également eu tendance à créer quelque chose à sa propre image. »
Roberto Calasso, Le livre de tous les livres
Le nom et l'image sont des catégories centrales dans la Bible et dans le Psaume 147, qui révèle comment, dans cet humanisme, la pauvreté engendre la richesse.
Dans quelques régions d'Italie, dont la mienne, lors certains échanges affectueux, les mères et les pères appellent leur fils et leur fille par leur propre nom. Ils leur disent : "Allez, maman, sois bon", "Mais comme tu es forte, papa". Ils s’adressent à leurs enfants, mais parfois ils continuent à leur parler ainsi quand ils sont adultes. Cette façon de s’exprimer ne figure dans aucun livre de grammaire, on ne l'apprend pas à l'école. Nous la reprenons parce que nous l'avons entendu dire par nos parents aux jours heureux de notre vie. Ce sont des façons de dire assimilées par osmose, qui passent ensuite d'une génération à l'autre : elles font partie de cette transmission des fondamentaux de la vie. Elles sucitent les plus beaux accents des dialogues du cœur, dans ces tête à tête délicats et secrets qui contiennent toute la tendresse typique et unique qui circule entre parents et enfants, qui les nourrit en permanence, mais surtout aux moments des grandes joies et des grandes peines.
[fulltext] =>La Bible nous dit que le premier qui nous a appelés par son propre nom était et est Dieu, lorsqu'il nous a créés "à son image et à sa ressemblance". Il nous l'a dit lui-même, et il répète notre nom à chaque instant. Car si d'une part le Dieu de la Bible est la divinité la plus transcendante et la plus différente de toutes, d'autre part il n'y a rien sur Terre qui lui ressemble plus qu'un être humain, il n'y a pas de cœur plus semblable au sien que le nôtre, il n'y a pas de nom qui ressemble plus au sien que le nôtre. La Bible nous a ôté l'image de Dieu, mais elle nous a donné une merveilleuse image de l'homme et de la femme : en cachant le visage de Dieu, elle a exalté le nôtre. Ainsi, chaque fois qu'on aime et respecte le nom d'un homme ou d'une femme, on aime et respecte le nom de Dieu ; et, en vertu de la loi de réciprocité, chaque fois qu'un homme prie et loue le nom de Dieu, il prie et loue l'humanité entière, chaque homme et chaque femme.
C'est ici que naît le regard positif que la Bible, avec détermination et ténacité, porte sur les hommes et les femmes. Ce regard voit leurs limites, leurs péchés, leurs meurtres et leurs fratricides, mais il voit d'abord et surtout l'image de Dieu se refléter en eux, il est incapable de sortir de l'Éden. Il voit les nombreux gestes des hommes, mais d'abord et surtout il continue à voir l’homme en train de dialoguer avec Élohim en fin de journée. Comme les mères et les pères, qui même lorsque la vie conduit leurs enfants à accomplir des actions mauvaises et répugnantes, continuent, pour se sauver et pour les sauver, à rêver d'enfants purs et beaux, à les appeler jusqu’’à la fin "papa" et "maman", même à l'intérieur des prisons. Entre la foi, l'espérance et l'agapè, il existe le même type de relation qu’entre les trois Personnes divines : en chacune d'elles, il y a les deux autres, chacune est en présence des deux autres en même temps, il est impossible de les séparer sans les détruire toutes. Il en va de même à propos des Psaumes : même s’ils regorgent de sentiments de tristesse, de déception et de chagrin, le regard d'espoir, de foi et d’amour omniprésent dans le Psautier est plus fort et plus grand, ce qui en fait peut-être le Livre le plus beau de tous, car c'est celui qui est le plus à même de nous parler du paradis depuis l’enfer, de l'espérance dans le désespoir, de la beauté au milieu de la laideur.
La force des Psaumes réside dans leur vérité. Un véritable enfer est préférable à un faux paradis, car tant que nous appelons l'enfer par son vrai nom, nous pouvons toujours désirer un paradis, que nous ne désirons plus si nous pensons l'avoir déjà atteint : « Alléluia ! Il est bon de fêter notre Dieu, il est beau de chanter sa louange ! Le Seigneur rebâtit Jérusalem, il rassemble les déportés d'Israël ; il guérit les coeurs brisés et soigne leurs blessures… Entonnez pour le Seigneur l'action de grâce, jouez pour notre Dieu sur la cithare ! » (Psaume 147, 1-7). Il est beau de chanter des hymnes au Seigneur. Il est beau et bon de louer YHWH, c'est beau et bon pour Dieu mais c'est beau et bon pour nous aussi. Le Psaume commence par une louange de la louange. C'est le moment où la personne qui prie prend conscience d’elle-même : ce moment advient (s’il advient) lorsque nous réalisons que le premier fruit de la louange est de prendre conscience de sa beauté et du don qu’elle est itrinsèquement. Découvrir que nous prions pour louer Dieu, et, tandis que nous chantons, avoir le sentiment que c'est Dieu qui nous loue et chante en notre honneur. Nous prononçons son nom et un jour nous comprenons que c'est en fait Dieu qui prononce le nôtre, et qu'à travers notre nom il prononce le nom de tous, celui de chaque créature, le nom des étoiles et de l'univers entier. Et c'est merveilleux. Et tandis que nous sommes à la recherche des plus belles litanies à la louange de Dieu, nous apprenons aussi les plus beaux chants et les plus beaux poèmes pour nous louer les uns les autres. Il n’y a probablement aucun mot sublime destiné à la louange de Dieu qu'un poète n'ait pas aussi utilisé pour un être cher, et peut-être n'y a-t-il aucun poème d'amour que son auteur n’ait pas par ailleurs utilisé, inconsciemment peut-être, pour chanter Dieu. Tout cela est aussi image et réciprocité. En bénissant les humains, nous avons appris à bénir Dieu, et en bénissant Dieu, nous sommes déjà en train de bénir les hommes et les femmes, même si nous ne le savons pas.
Être à l'image du Créateur fait immédiatement de notre louange à Dieu une louange cosmique : « Il compte le nombre des étoiles, il donne à chacune un nom… Il couvre le ciel de nuages, il prépare la pluie pour la terre ; il fait germer l'herbe sur les montagnes et les plantes pour l'usage des hommes ; il donne leur pâture aux troupeaux, aux petits du corbeau qui la réclament. » (147, 4 ; 8-9). Être l'image d’Élohim nous rend plus grands que notre seule image humaine. Dès notre plus jeune âge nous faisons l’expérience d’une profonde fraternité cosmique– seuls les enfants peuvent vraiment se sentir frères et sœurs des chats et des oiseaux, des fleurs et des feuilles -, nous devrions pouvoir ne pas la perdre en grandissant et si notre vie progresse, cette grande fraternité grandit avec nous, et se termine par le chant à notre sœur la mort. La fraternité entre humains ne nous suffit pas, elle est trop petite bien qu'elle soit déjà immense. Pour que la fraternité entre tous les humains soit un authentique humanisme, nous devons l’étendre aux étoiles, au soleil, aux oiseaux, à toute la nature - il y a peu de chants (s'il y en a !) plus bibliques que le Cantique de François. La référence aux "petits du corbeau qui crient" est très belle et délicate. Dans ce verset, il y a les corbeaux qui ont nourri Élie dans son envol (1 Rois 17, 6), mais il y a aussi les oiseaux du nid protégés par la loi mosaïque qui ordonne de ne pas capturer l'oiseau mère qui couve ses œufs ou qui garde ses petits, de la laisser s'envoler, "afin que vous soyez heureux et que vous ayez une longue vie" (Dt 22, 7). Une loi de YHWH qui scrute même l'intérieur d'un nid d'oiseau, puis établit une équivalence qui peut nous paraître audacieuse et étonnante. La promesse réservée à ceux qui laissent la mère s'envoler sans la capturer est la même que celle du quatrième commandement, Honore ton père et ta mère : « Pour que tes jours soient longs et que tu sois heureux » (Dt 5,16).
Dans la Bible, tout est création : tout est engendré. Dieu regarde le monde de cette manière, c'est ainsi qu'il nous regarde, et nous, son image, nous apprenons à regarder le monde de la même manière, même si toute la création « gémit et passe par les douleurs de l’enfantement », car « elle attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » (Rom 8, 19-23). Toute la création gémit et attend d'être enfin regardée de cette façon. Jamais, comme en ces années de crise environnementale et de destruction de la planète, nous ne sommes en mesure de comprendre les Psaumes et ce mystérieux passage de Paul aux Romains : « Nous le savons bien, la création tout entière gémit, elle passe par les douleurs d’un enfantement » la terre souffre et attend que les hommes se révèlent enfin pour ce qu'ils sont, pour se comporter avec elle comme des enfants et l'image de Dieu créateur et père. Le psaume 147 se distingue également par le fait qu'il s'agit d'un chant profane. Il n'y a ni prêtres ni rois, aucune mention de David ni allusion au temple. Ce sont les citoyens qui élèvent leur chant, ceux qui connaissent les temps et les rythmes des saisons et du travail, la valeur de la paix et du pain quotidien. Un psaume très apprécié par les paysans : « Il fait régner la paix à tes frontières, et d'un pain de froment te rassasie… Il étale une toison de neige, il sème une poussière de givre.Il jette à poignées des glaçons ; devant ce froid, qui pourrait tenir ? Il envoie sa parole : survient le dégel ; il répand son souffle : les eaux coulent. » (139,14-18). Toute la terre est enveloppée par un regard bienveillant, tout est gouverné par la providence.
Après nous avoir donné jusqu'à présent de belles paroles sur Dieu et sur nous, le Psaume se termine en louant directement la Parole, ainsi que l'Alliance et la Loi qui en sont le point culminant (147, 19-20). La parole est considérée comme un message envoyé pour nous, une intelligence qui nous fait découvrir l'ordre et le sens de la création : « Il envoie sa parole sur la terre : rapide, son verbe la parcourt » (147, 15). La Parole est aussi le logos, elle est raisonnement et ordre. Israël lui a conféré une très haute valeur, aujourd'hui incompréhensible pour nous. Avec les patriarches, Moïse et les prophètes, il en a fait une expérience extraordinaire – « ... et il y avait seulement une voix. » Ayant dû renoncer à l'image de Dieu, Israël a considérablement tiré parti du langage, il a dû apprendre à dessiner Dieu avec des mots, il a découvert les mille dimensions cachées dans la parole biblique et dans les mots humains. Cette grande pauvreté a produit une richesse infinie. Peut-être n'aurions-nous pas l'extraordinaire tradition littéraire occidentale sans cette parole biblique dépourvue d'images, qui l'a forcée à devenir image sans verser dans l’idolâtrie.
Lorsque Jean a écrit le Prologue de son Évangile, l'un des textes les plus brillants de l'histoire, il avait beaucoup de choses en tête, mais il a certainement pensé aux paroles des Psaumes, à ce Logos (le Verbe) capable de bénir l'homme tandis qu’il bénissait et louait Dieu. En nous disant que le Logos s'est fait chair, qu'il est devenu un homme comme nous, il nous a dit beaucoup de choses, toutes merveilleuses, et il nous a encore appelés avec le même nom que Dieu. Et il continue à nous appeler ainsi chaque jour.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 18/10/2020
"« L'interdiction des images était un précepte capital qui serait fatalement violé. Tout d'abord par YHWH lui-même, qui avait façonné l'homme "à notre image et à notre ressemblance". YHWH avait voulu créer un être à sa propre image – et à son tour, cet être aurait également eu tendance à créer quelque chose à sa propre image. »
Roberto Calasso, Le livre de tous les livres
Le nom et l'image sont des catégories centrales dans la Bible et dans le Psaume 147, qui révèle comment, dans cet humanisme, la pauvreté engendre la richesse.
Dans quelques régions d'Italie, dont la mienne, lors certains échanges affectueux, les mères et les pères appellent leur fils et leur fille par leur propre nom. Ils leur disent : "Allez, maman, sois bon", "Mais comme tu es forte, papa". Ils s’adressent à leurs enfants, mais parfois ils continuent à leur parler ainsi quand ils sont adultes. Cette façon de s’exprimer ne figure dans aucun livre de grammaire, on ne l'apprend pas à l'école. Nous la reprenons parce que nous l'avons entendu dire par nos parents aux jours heureux de notre vie. Ce sont des façons de dire assimilées par osmose, qui passent ensuite d'une génération à l'autre : elles font partie de cette transmission des fondamentaux de la vie. Elles sucitent les plus beaux accents des dialogues du cœur, dans ces tête à tête délicats et secrets qui contiennent toute la tendresse typique et unique qui circule entre parents et enfants, qui les nourrit en permanence, mais surtout aux moments des grandes joies et des grandes peines.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 11/10/2020
« S’il y a un Autre, quel qu’il soit, où qu’il soit, quels que soient ses rapports avec moi, sans même qu’il agisse autrement sur moi que par le pur surgissement de son être, j’ai un dehors, j’ai une nature ; ma chute originelle c’est l’existence de l’autre. »
Jean Paul Sartre, L'être et le néant
Le psaume 139 est un grand message poétique sur l'essence de la foi et le mystère de la personne : sous le regard de Dieu, celle-ci accède à une beauté plus profonde et plus grande.
Dans notre âme se trouve un lieu secret et très profond qui abrite une subtile et délicate mélancolie. Celle-ci se manifeste lorsque nous réalisons que même la communion avec ceux qui nous aiment s'arrête à la porte d'une intimité secrète, là où se trouve ce qu’il y a de plus vrai et de plus beau en nous. Nous savons que nos amis, nos parents, notre femme, nos enfants nous aiment et nous connaissent vraiment, mais cette connaissance pleine d’affection qu'ils ont de nous ne peut pas atteindre le cœur de notre cœur. Ce n'est que s'ils y arrivaient qu'ils nous connaîtraient vraiment, parce qu'ils percevraient une beauté inconnue : si quelqu'un pouvait nous rejoindre à ce niveau de profondeur, il comprendrait que nous sommes meilleurs que ce que nous apparaissons, que nous sommes plus beaux que la personne qu'il a connue jusqu'à présent. S'il est vrai que l'autre est "celui qui me regarde" (J. P. Sartre), il est encore plus vrai que l'autre ne me contemple jamais assez, ne voit pas ce qu’il y a de meilleur en moi. On peut connaître quelque chose d’une personne, certains en connaissent même l'essentiel, mais celui-ci ne suffit pas, dans ce domaine l'essentiel est trop peu.
Tout au fond de notre âme se trouve une pureté invisible, l’innocence que nous avons perdue en grandissant mais qui n'a pas été effacée, même par nos plus grandes erreurs : elle croit en nous quand plus personne ne croit en nous (à commencer par nous-mêmes). C'est le jardin de cet Adam que nous sommes encore, c'est la hutte indienne que nous avons construite quand nous étions enfants et où nous nous réfugions pour fuir les fantômes, c'est la maison de poupées. Et c’est dans cette maisonnette, qui s’est de plus en plus rétrécie au fur et à mesure que nous avons grandi, que nous revenons aux jours sombres de notre vie, lorsque nous sommes poursuivis et condamnés par tout le monde, mais conscients qu'il y a un coin de l'univers meilleur que l'homme et la femme que les autres voient. C'est ce refuge invisible qui rend la vie possible au cours des exils, dans les prisons, après les grands péchés. Et puis arrive le jour où nous comprenons que le fossé entre ce que nous sommes vraiment et ce que les autres perçoivent ne sera jamais comblé, et que cette beauté la plus intime sera le secret et la dot que nous présenterons à notre dernier rendez-vous. Et naît une nouvelle paix, une nouvelle réconciliation avec la vie et avec les autres, on cesse de se plaindre de ne pas être assez aimé. Parce que nous comprenons que c'est l'existence de cet espace de beauté protégé du regard des autres qui rend l'expérience de la réciprocité et de la reconnaissance toujours insuffisante. Nous devons attendre beaucoup des réciprocités de notre vie, mais nous ne devons pas leur en demander trop.
La Bible ne connaissait pas l'inconscient ni la psychanalyse, et elle ne savait pas, contrairement à nous, que dans cet angle caché, se sont accumulées de nombreuses réalités différentes. Mais elle connaissait les hommes et les femmes, et elle connaissait Dieu. Elle nous a donc dit quelque chose d'important, qui reste vrai même à notre époque où nous avons connu les autres "habitants" invisibles de cette intimité qui est la nôtre. Elle nous a dit et continue à nous dire que ce fonds inexploré est habité par un hôte bienveillant qui depuis toujours y a établi sa demeure, qui le connaît mieux que nous-mêmes pensons le connaître. Elle nous dit que cette certitude d'être meilleur que ce que nous sommes devenus est tout amour, que c'est le premier don que Dieu nous fait, le moyen par lequel il continue à nous sauver chaque jour : « Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m'assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées. Que je marche ou me repose, tu le vois, tous mes chemins te sont familiers. Avant qu'un mot ne parvienne à mes lèvres, déjà, Seigneur, tu le sais. Tu me devances et me poursuis, tu m'enserres, tu as mis la main sur moi. Savoir prodigieux qui me dépasse, hauteur que je ne puis atteindre ! » (Psaume 139,1-6).
La connaissance dont parle ce Psaume, l'une des plus sublimes et poétiques du Psautier, ne relève pas d’un savoir divin omniscient et abstrait. La connaissance sublime qui intéresse ici le psalmiste est celle que Dieu a de nous, qu'il a de lui, l'auteur du psaume, qu'il a de moi, de chaque personne. C'est l'expérience d'être connu par un regard plus amical et plus profond que celui des autres, plus amical et plus profond que mon propre regard : "inaccessible pour moi". Ici se manifeste une racine profonde de la foi biblique. La foi, c'est d'abord l'expérience d'être regardé, d'être perçu par un esprit bienveillant. Je suis aimé parce que je suis regardé, aimé à travers ce regard qui atteint la profondeur qui abrite mon mystère. Ensuite, la foi biblique, avant d'être un ensemble de normes et de vérités auxquelles il faut croire, c’est l'expérience personnelle de ce regard profond. La religion peut commencer par le culte et la loi, mais la foi commence quand on se sent regardé, vu et appelé par son nom.
Les hommes ont toujours eu le sentiment d’être vus par Dieu et par ses esprits, ils se sentaient vivre sous un regard invisible venant d'en haut. Mais en général, cette expérience était source d’angoisse. L'homme craignait le regard des dieux. Il se cachait, il voulait fuir, car être vu par eux était l'expérience du dévoilement des péchés et donc de la culpabilité. C'était le regard du juge, le regard de ceux qui veulent nous voir pour nous condamner. "Dieu te voit" : cette expression servait à susciter la peur et la terreur. La Bible opère aussi une révolution dans ce domaine. Le regard de Dieu est avant tout un regard d'amour, il est libération et joie. Dieu voit aussi nos péchés, mais il voit d'abord que nous sommes des enfants ; il voit le geste de Caïn, mais il voit d'abord le geste d'Élohim qui a créé Adam à son image et à sa ressemblance. C'est là que réside l'anthropologie biblique de la primauté d'Adam sur Caïn, car Adam vit dans un coin de son cœur plus profond que celui qui abrite son fils fratricide. À partir de cette intimité habitée, nous apprenons que l'univers entier est également soutenu et habité par Dieu : le ciel étoilé à l'intérieur de moi me fait voir le ciel étoilé au-dessus de moi. Une expérience qui devient immédiatement un chant : « Je gravis les cieux : tu es là ; je descends chez les morts : te voici. Je prends les ailes de l'aurore et me pose au-delà des mers : même là, ta main me conduit, ta main droite me saisit. J'avais dit : « Les ténèbres m'écrasent ! » mais la nuit devient lumière autour de moi. Même la ténèbre pour toi n'est pas ténèbre, et la nuit comme le jour est lumière ! » (139, 8-12). Magnifique!
Si la rencontre avec Dieu consiste à être vus de l'intérieur, alors ce regard était présent même lorsque nous ne le connaissions pas. Il était là, invisible, mais présent : « C'est toi qui as créé mes reins, qui m'as tissé dans le sein de ma mère. Je reconnais devant toi le prodige, l'être étonnant que je suis : étonnantes sont tes oeuvres toute mon âme le sait. Mes os n'étaient pas cachés pour toi quand j'étais façonné dans le secret, modelé aux entrailles de la terre. J'étais encore inachevé, tu me voyais ; sur ton livre, tous mes jours étaient inscrits, recensés avant qu'un seul ne soit ! » (139, 13-16). Ces versets rappellent étroitement ceux de Job, mais aussi les "ossements" de Jérémie (20, 9) et l'histoire de sa vocation prophétique. La foi commence en un jour, mais elle a toujours été là. Un jour, vous prenez conscience de quelque chose qui existait déjà, cette conscience qui émerge à un moment précis, lorsque vous comprenez que la phrase que nous écrivons ce jour-là fait partie d'un "livre". Et l'un des plus grands dons que celui de la foi apporte avec elle - dans le psaume 139, la foi est présentée réellement et authentiquement come un don, avant d'être aussi une vertu (ne serait-ce que pour la garder) -, consiste en cet exercice admirable qui suit le début de la foi, lorsque nous relisons notre histoire : comme avec un vieil album photo, nous feuilletons page après page notre passé et nous le comprenons enfin, nous comprenons différemment ces mêmes photos d'autrefois soudain éclairées d'une lumière immense. Ceux qui croient ont toujours cru, et ne le savaient pas.
Dans ces versets, nous trouvons également une splendide synthèse de ce qu'est une vocation. Au début, il y a un regard, on se sent vu par un œil qui nous regarde et nous voit comme personne ne nous a jamais vus. Un regard qui devient immédiatement une voix, car en nous regardant il prononce notre nom, il révèle notre mission et notre place dans le monde, il nous fait entrevoir que les épisodes qui ont marqué notre vie ont un sens, que ce sont les chapitres du "livre" que nous écrivions déjà, sans le savoir. C'est à ce niveau intime et profond que se joue le destin d'une vocation. Il ne s'agit pas de bonheur ni de malheur (la Bible et la vie débordent de vocations très malheureuses mais immenses), ni de calculs de coûts-bénéfices (quelle monnaie utiliser ?), ni, encore moins, de se retrouver dans les conditions subjectives et objectives de pouvoir réussir la tâche (la plupart des vocations authentiques ne sont pas des "victoires", ce sont des histoires d'échec). Dans ces vocations, une personne fait seulement et simplement ce qu'elle est, ce qu'elle a vu pendant qu'elle était vue, ce qu'elle découvre qu'elle a toujours été et sera : « Où donc aller, loin de ton souffle ? où m'enfuir, loin de ta face ? Je gravis les cieux : tu es là ; je descends chez les morts : te voici. » (139,8). Il ne s'agit pas d'une vision fataliste ou statique, comme ce serait le cas si le rôle de la personne se limitait à jouer une partition déjà écrite - sans même avoir la liberté d’exécution d'un morceau de jazz. Une vocation évolue entre la liberté maximale - parce qu'il n'y a pas de plus grande liberté que celle de ceux qui obéissent à la partie la plus vraie et la plus belle d'eux-mêmes - et la non-liberté maximale, parce que ce regard nous suit partout et nous rappelle à chaque instant qui et ce que nous sommes vraiment. Vous pouvez quitter une communauté ou une épouse, mais vous ne pouvez pas vous soustraire à l'action de ce regard.
L'impossibilité de quitter l’orbite de la pupille de Dieu n'offre aucune garantie de ne pas faire de mauvais choix, parfois de très mauvais choix . La bonne nouvelle de la Bible est une autre : même si, pour échapper à vous-même, vous "descendez en enfer", même là, vous continuez à être observé et regardé. Et chaque fois que vous prenez "les ailes de l'aube" pour vous envoler au loin, partout où ce vol fou vous emmène, lorsque vous touchez cette cet espace plus intime à vous même que vous même, il y aura quelqu'un qui vous attendra et vous rappellera que vous aussi, vous êtes plus grand que votre cœur.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 11/10/2020
« S’il y a un Autre, quel qu’il soit, où qu’il soit, quels que soient ses rapports avec moi, sans même qu’il agisse autrement sur moi que par le pur surgissement de son être, j’ai un dehors, j’ai une nature ; ma chute originelle c’est l’existence de l’autre. »
Jean Paul Sartre, L'être et le néant
Le psaume 139 est un grand message poétique sur l'essence de la foi et le mystère de la personne : sous le regard de Dieu, celle-ci accède à une beauté plus profonde et plus grande.
Dans notre âme se trouve un lieu secret et très profond qui abrite une subtile et délicate mélancolie. Celle-ci se manifeste lorsque nous réalisons que même la communion avec ceux qui nous aiment s'arrête à la porte d'une intimité secrète, là où se trouve ce qu’il y a de plus vrai et de plus beau en nous. Nous savons que nos amis, nos parents, notre femme, nos enfants nous aiment et nous connaissent vraiment, mais cette connaissance pleine d’affection qu'ils ont de nous ne peut pas atteindre le cœur de notre cœur. Ce n'est que s'ils y arrivaient qu'ils nous connaîtraient vraiment, parce qu'ils percevraient une beauté inconnue : si quelqu'un pouvait nous rejoindre à ce niveau de profondeur, il comprendrait que nous sommes meilleurs que ce que nous apparaissons, que nous sommes plus beaux que la personne qu'il a connue jusqu'à présent. S'il est vrai que l'autre est "celui qui me regarde" (J. P. Sartre), il est encore plus vrai que l'autre ne me contemple jamais assez, ne voit pas ce qu’il y a de meilleur en moi. On peut connaître quelque chose d’une personne, certains en connaissent même l'essentiel, mais celui-ci ne suffit pas, dans ce domaine l'essentiel est trop peu.
Tout au fond de notre âme se trouve une pureté invisible, l’innocence que nous avons perdue en grandissant mais qui n'a pas été effacée, même par nos plus grandes erreurs : elle croit en nous quand plus personne ne croit en nous (à commencer par nous-mêmes). C'est le jardin de cet Adam que nous sommes encore, c'est la hutte indienne que nous avons construite quand nous étions enfants et où nous nous réfugions pour fuir les fantômes, c'est la maison de poupées. Et c’est dans cette maisonnette, qui s’est de plus en plus rétrécie au fur et à mesure que nous avons grandi, que nous revenons aux jours sombres de notre vie, lorsque nous sommes poursuivis et condamnés par tout le monde, mais conscients qu'il y a un coin de l'univers meilleur que l'homme et la femme que les autres voient. C'est ce refuge invisible qui rend la vie possible au cours des exils, dans les prisons, après les grands péchés. Et puis arrive le jour où nous comprenons que le fossé entre ce que nous sommes vraiment et ce que les autres perçoivent ne sera jamais comblé, et que cette beauté la plus intime sera le secret et la dot que nous présenterons à notre dernier rendez-vous. Et naît une nouvelle paix, une nouvelle réconciliation avec la vie et avec les autres, on cesse de se plaindre de ne pas être assez aimé. Parce que nous comprenons que c'est l'existence de cet espace de beauté protégé du regard des autres qui rend l'expérience de la réciprocité et de la reconnaissance toujours insuffisante. Nous devons attendre beaucoup des réciprocités de notre vie, mais nous ne devons pas leur en demander trop.
La Bible ne connaissait pas l'inconscient ni la psychanalyse, et elle ne savait pas, contrairement à nous, que dans cet angle caché, se sont accumulées de nombreuses réalités différentes. Mais elle connaissait les hommes et les femmes, et elle connaissait Dieu. Elle nous a donc dit quelque chose d'important, qui reste vrai même à notre époque où nous avons connu les autres "habitants" invisibles de cette intimité qui est la nôtre. Elle nous a dit et continue à nous dire que ce fonds inexploré est habité par un hôte bienveillant qui depuis toujours y a établi sa demeure, qui le connaît mieux que nous-mêmes pensons le connaître. Elle nous dit que cette certitude d'être meilleur que ce que nous sommes devenus est tout amour, que c'est le premier don que Dieu nous fait, le moyen par lequel il continue à nous sauver chaque jour : « Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m'assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées. Que je marche ou me repose, tu le vois, tous mes chemins te sont familiers. Avant qu'un mot ne parvienne à mes lèvres, déjà, Seigneur, tu le sais. Tu me devances et me poursuis, tu m'enserres, tu as mis la main sur moi. Savoir prodigieux qui me dépasse, hauteur que je ne puis atteindre ! » (Psaume 139,1-6).
La connaissance dont parle ce Psaume, l'une des plus sublimes et poétiques du Psautier, ne relève pas d’un savoir divin omniscient et abstrait. La connaissance sublime qui intéresse ici le psalmiste est celle que Dieu a de nous, qu'il a de lui, l'auteur du psaume, qu'il a de moi, de chaque personne. C'est l'expérience d'être connu par un regard plus amical et plus profond que celui des autres, plus amical et plus profond que mon propre regard : "inaccessible pour moi". Ici se manifeste une racine profonde de la foi biblique. La foi, c'est d'abord l'expérience d'être regardé, d'être perçu par un esprit bienveillant. Je suis aimé parce que je suis regardé, aimé à travers ce regard qui atteint la profondeur qui abrite mon mystère. Ensuite, la foi biblique, avant d'être un ensemble de normes et de vérités auxquelles il faut croire, c’est l'expérience personnelle de ce regard profond. La religion peut commencer par le culte et la loi, mais la foi commence quand on se sent regardé, vu et appelé par son nom.
Les hommes ont toujours eu le sentiment d’être vus par Dieu et par ses esprits, ils se sentaient vivre sous un regard invisible venant d'en haut. Mais en général, cette expérience était source d’angoisse. L'homme craignait le regard des dieux. Il se cachait, il voulait fuir, car être vu par eux était l'expérience du dévoilement des péchés et donc de la culpabilité. C'était le regard du juge, le regard de ceux qui veulent nous voir pour nous condamner. "Dieu te voit" : cette expression servait à susciter la peur et la terreur. La Bible opère aussi une révolution dans ce domaine. Le regard de Dieu est avant tout un regard d'amour, il est libération et joie. Dieu voit aussi nos péchés, mais il voit d'abord que nous sommes des enfants ; il voit le geste de Caïn, mais il voit d'abord le geste d'Élohim qui a créé Adam à son image et à sa ressemblance. C'est là que réside l'anthropologie biblique de la primauté d'Adam sur Caïn, car Adam vit dans un coin de son cœur plus profond que celui qui abrite son fils fratricide. À partir de cette intimité habitée, nous apprenons que l'univers entier est également soutenu et habité par Dieu : le ciel étoilé à l'intérieur de moi me fait voir le ciel étoilé au-dessus de moi. Une expérience qui devient immédiatement un chant : « Je gravis les cieux : tu es là ; je descends chez les morts : te voici. Je prends les ailes de l'aurore et me pose au-delà des mers : même là, ta main me conduit, ta main droite me saisit. J'avais dit : « Les ténèbres m'écrasent ! » mais la nuit devient lumière autour de moi. Même la ténèbre pour toi n'est pas ténèbre, et la nuit comme le jour est lumière ! » (139, 8-12). Magnifique!
Si la rencontre avec Dieu consiste à être vus de l'intérieur, alors ce regard était présent même lorsque nous ne le connaissions pas. Il était là, invisible, mais présent : « C'est toi qui as créé mes reins, qui m'as tissé dans le sein de ma mère. Je reconnais devant toi le prodige, l'être étonnant que je suis : étonnantes sont tes oeuvres toute mon âme le sait. Mes os n'étaient pas cachés pour toi quand j'étais façonné dans le secret, modelé aux entrailles de la terre. J'étais encore inachevé, tu me voyais ; sur ton livre, tous mes jours étaient inscrits, recensés avant qu'un seul ne soit ! » (139, 13-16). Ces versets rappellent étroitement ceux de Job, mais aussi les "ossements" de Jérémie (20, 9) et l'histoire de sa vocation prophétique. La foi commence en un jour, mais elle a toujours été là. Un jour, vous prenez conscience de quelque chose qui existait déjà, cette conscience qui émerge à un moment précis, lorsque vous comprenez que la phrase que nous écrivons ce jour-là fait partie d'un "livre". Et l'un des plus grands dons que celui de la foi apporte avec elle - dans le psaume 139, la foi est présentée réellement et authentiquement come un don, avant d'être aussi une vertu (ne serait-ce que pour la garder) -, consiste en cet exercice admirable qui suit le début de la foi, lorsque nous relisons notre histoire : comme avec un vieil album photo, nous feuilletons page après page notre passé et nous le comprenons enfin, nous comprenons différemment ces mêmes photos d'autrefois soudain éclairées d'une lumière immense. Ceux qui croient ont toujours cru, et ne le savaient pas.
Dans ces versets, nous trouvons également une splendide synthèse de ce qu'est une vocation. Au début, il y a un regard, on se sent vu par un œil qui nous regarde et nous voit comme personne ne nous a jamais vus. Un regard qui devient immédiatement une voix, car en nous regardant il prononce notre nom, il révèle notre mission et notre place dans le monde, il nous fait entrevoir que les épisodes qui ont marqué notre vie ont un sens, que ce sont les chapitres du "livre" que nous écrivions déjà, sans le savoir. C'est à ce niveau intime et profond que se joue le destin d'une vocation. Il ne s'agit pas de bonheur ni de malheur (la Bible et la vie débordent de vocations très malheureuses mais immenses), ni de calculs de coûts-bénéfices (quelle monnaie utiliser ?), ni, encore moins, de se retrouver dans les conditions subjectives et objectives de pouvoir réussir la tâche (la plupart des vocations authentiques ne sont pas des "victoires", ce sont des histoires d'échec). Dans ces vocations, une personne fait seulement et simplement ce qu'elle est, ce qu'elle a vu pendant qu'elle était vue, ce qu'elle découvre qu'elle a toujours été et sera : « Où donc aller, loin de ton souffle ? où m'enfuir, loin de ta face ? Je gravis les cieux : tu es là ; je descends chez les morts : te voici. » (139,8). Il ne s'agit pas d'une vision fataliste ou statique, comme ce serait le cas si le rôle de la personne se limitait à jouer une partition déjà écrite - sans même avoir la liberté d’exécution d'un morceau de jazz. Une vocation évolue entre la liberté maximale - parce qu'il n'y a pas de plus grande liberté que celle de ceux qui obéissent à la partie la plus vraie et la plus belle d'eux-mêmes - et la non-liberté maximale, parce que ce regard nous suit partout et nous rappelle à chaque instant qui et ce que nous sommes vraiment. Vous pouvez quitter une communauté ou une épouse, mais vous ne pouvez pas vous soustraire à l'action de ce regard.
L'impossibilité de quitter l’orbite de la pupille de Dieu n'offre aucune garantie de ne pas faire de mauvais choix, parfois de très mauvais choix . La bonne nouvelle de la Bible est une autre : même si, pour échapper à vous-même, vous "descendez en enfer", même là, vous continuez à être observé et regardé. Et chaque fois que vous prenez "les ailes de l'aube" pour vous envoler au loin, partout où ce vol fou vous emmène, lorsque vous touchez cette cet espace plus intime à vous même que vous même, il y aura quelqu'un qui vous attendra et vous rappellera que vous aussi, vous êtes plus grand que votre cœur.
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stdClass Object ( [id] => 18581 [title] => Et grâce au chant la vie recommença [alias] => et-grace-au-chant-la-vie-recommenca [introtext] =>L'âme et la cithare/27 - Nous revenons de nos exils et sortons de nos deuils lorsque nous retrouvons notre voix.
par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 04/10/2020
« Si grande soit-elle, la douleur liée à la perte d’un être cher nous impose immédiatement d'éviter la perte la plus irréparable et la plus décisive : celle de nous-mêmes. C'est pourquoi, dans la mort de l'être aimé, nous sommes impérativement appelés à devenir des procureurs réclamant la mort de cette mort même. »
Ernesto de Martino, La mort et les pleurs rituels dans le monde antique
Le psaume 137, celui de l'Exil, nous livre un message très éclairant sur les raisons et la façon de reprendre, avec un cœur renouvelé, les cithares d’autrefois.
Notre époque traverse une longue éclipse des lieux, et donc du sens de la terre. Avec le désenchantement progressif du monde, nous avons non seulement cessé de croire que la terre était habitée par les dieux, mais nous avons aussi oublié que les lieux ont une âme, différente, mais non moins vivante et réelle que celle des hommes. Nous avons inventé l'espace, l'espace anonyme et rationnel des cartes géographiques, et nous n'avons donc pas appris à reconnaître les lieux, ni leur vocation unique, ni leur message, ni leur destin. Dans la Bible, Dieu est une voix qui parle dans des lieux. Dieu n'est pas utopique, car il a sa place : un autel, une montagne, un temple. Des lieux qui ne l’emprisonnent (Dieu reste libre des siens comme des nôtres), mais qui conservent à jamais les signes de sa présence. L'homme biblique peut être nomade et se déplacer car son territoire est marqué par une présence authentique de Dieu : c’est un pèlerin qui n’est jamais désorienté. Le lieu est plutôt l'ami du temps, ce qui n’est pas le cas de l’espace, car on peut le situer avec précision : dans cette communauté, dans cette famille, dans cette région, où la vie se transmet depuis des générations. Et les biens communs ne disparaissent tant qu’ils deviennent des lieux et ne se réduisent pas à des espaces.
[fulltext] =>Ayant oublié le langage des lieux, nous ne comprenons pas ce qu'est l'exil dans la Bible. Pour en saisir certaines dimensions, nous devons le comparer à cette expérience extrême, propre à notre condition, qu’est le deuil. Parce qu’il y a dans l'exil babylonien, tout comme dans le deuil, une crise de la présence. Et tout comme à l’occasion des grands deuils nous faisons l'expérience du déracinement, de la disparition de nos certitudes et de nos valeurs, en risquant nous aussi de disparaître avec ceux qui nous ont quittés, de mourir avec ceux qui sont morts, dans l’ exil babylonien le grand défi, pour les hébreux, fut de réussir à ne pas mourir avec leur patrie, avec le temple détruit, avec la terre promise, avec leur Dieu vaincu. Il n'est donc pas surprenant qu'Ézéchiel, dans son livre, utilise la même expression – "la lumière de mes yeux" – pour désigner son épouse décédée et Jérusalem détruite.
Le travail de deuil, très difficile de nos jours , consiste à empêcher l'être aimé de disparaître complètement de notre vie, mais consiste aussi à éviter que le fait qu'il continue à vivre en nous entraîne le début de notre mort. Lors de son exil, Israël s’est trouvé confronté à vivre un exercice complexe, celui de ne pas oublier Sion, mais sans trop s'en souvenir, au risque de mourir avec elle : « Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, nous souvenant de Sion ; aux saules des alentours nous avions pendu nos harpes.» (Psaume 137, 1-2). C'est le merveilleux psaume de l'exil, peut-être la plus belle élégie de la Bible. Ce psaume, plus que tout autre, nous plonge dans le cheminement collectif, spirituel et éthique, par lequel Israël a essayé de donner un sens à sa plus grande tragédie afin de continuer à vivre.
La première image qui nous parvient est celle d'une grève des musiciens, peut-être un groupe d'anciens choristes du temple. Ils ont accroché leurs cithares aux branches des saules (ou des peupliers) qui longeaient les rives fertiles des fleuves de Babylone. C’est là qu’ils s’asseyaient, qu’ils pleuraient ensemble. Jusqu’au jour où ils ont cessé de chanter. Un jeûne collectif d'artistes, peut-être le premier dans l'histoire de l'humanité. C'est peut-être pour cette raison que le psaume 137 a été si prisé par les artistes, les musiciens et les poètes (de Camões à Verdi, de Bach à Salvatore Quasimodo). On ne chante pas en "terre inconnue" - adamah nekhar. Dans ce pays, on ne peut qu'entonner des lamentations funèbres, élever une complainte rituelle, on ne peut que hurler des mots désespérés pour les sublimer au sein d'une représentation sacrée (137,7-9). Mais entonner les cantiques du temple, il n’en n’est pas question : en terre d’exil, ce n'est pas possible. Et la réponse de ces chanteurs fut catégorique : nous ne pouvons pas. « Comment chanterions-nous un chant du Seigneur sur une terre étrangère ? »* (137,4). Car dans cette culture, les premiers à chanter et à jouer de la musique ce sont les murs du temple, puis la patrie… quant aux hommes et à leurs instruments ils ne viennent qu’à la fin. Ces cantiques ne peuvent être chantés qu'à Sion, et ils ne les entonneront à nouveau que lorsqu’ils y retourneront. Ce n’est qu’à Rhodes que certaines "avancées" peuvent se produire.
Le psaume nous fait part ensuite d’un cynisme et d’un sarcasme propres aux êtres humains : « C'est là que nos vainqueurs nous demandèrent des chansons, et nos bourreaux, des airs joyeux : "Chantez-nous, disaient-ils, quelque chant de Sion ". » (137, 3). L’une des pires atrocités qui soit consiste à oblige ceux qui pleurent à faire rire les autres - sarcasme signifie littéralement "déchirer la chair" sarx). C’est ce qu’ont fait les Philistins : « Et comme leur cœur était joyeux, ils dirent : "Appelez Samson, et qu’il nous divertisse ! "» (Jg 16,25), ce qu’ont toujours fait et continuent à faire les puissants avec les pauvres, avec les femmes, avec les victimes. Au cours de ce jeûne artistique, le peuple revit, collectivement, la même expérience qu'Ézéchiel, le grand prophète de l'Exil : « Je ferai coller ta langue à ton palais ; tu seras muet. » (Ez 3,26). Ézéchiel, prêtre privé de son temple, prophète privé de sa parole ; des chanteurs et des musiciens dont les harpes sont suspendues et muettes… autant d’images terribles et frappantes qui en disent long (presque tout !) sur la signification de la vie de ceux qui suivent honnêtement une voix.
À ce point, nous trouvons dans le psaume un serment sous forme d'auto-malédiction : « Si je t'oublie, Jérusalem, que ma main droite m'oublie ! Je veux que ma langue s'attache à mon palais, si je perds ton souvenir, si je n'élève Jérusalem, au sommet de ma joie. » (137, 5-6). Ces exilés étaient terrifiés à l’idée d'oublier Jérusalem et leur Dieu. Ils l'étaient parce qu'ils étaient attirés les dieux de ces fleuves de Babylone, ils éprouvaient dans leur chair la tentation de prêter leurs cithares à des chants différents de ceux appris à Sion. Ils se sont donc liés par une promesse, faite à Dieu et à leur âme. Les promesses sont aussi la corde qui lie ce que nous sommes aujourd'hui à ce que nous étions hier pour sauver du précipice ce que nous pouvons devenir demain. Chaque promesse est une prière qui demande à l'avenir de ne pas trahir son origine. Lorsque la vie nous conduit en exil, au début nous ne pensons qu’à nous séparer de nos cithares, de nos plumes, qu’à nous taire, qu’à pleurer et faire notre deuil. La Bible nous dit que ces jeûnes sont bénéfiques, que ces mutismes sont aussi des paroles de vie. Nous sommes déconcertés, déracinés, séparés et s’installe en nous et parmi nous une « infinie nostalgie de Sion » et de son temple merveilleux, surtout une infinie nostalgie de Dieu qui n'est plus là parce qu'il a été détruit - par d'autres, par nous, par Dieu lui-même. Tout ce que nous voulons et pouvons faire, c'est de rester assis en poussant à haute voix des lamentations vers le ciel et la vie. Cette phase peut durer longtemps. Pour certains elle dure toute la vie et ils ne rentrent jamais chez eux.
Parfois, un reste, un petit reste - une partie de cette communauté détruite, ou un petit coin encore vivant de notre âme blessée - reprend un jour la cithare en main, et entonne un chant nouveau. Un chant repris le long des mêmes rivières, entouré des mêmes tortionnaires et bourreaux. Il ne sait pas pourquoi, il sait juste qu'il doit chanter. Il réussit à chanter les mêmes airs qu’au temps de sa jeunesse, et il comprend que cette voix qui l'avait accompagné pendant la destruction puis en exil, cette voix inconnue et redoutée comme celle de l'idole ou du néant, était en fait la même voix bienveillante qui lui parlait à Sion, mais il ne le savait pas. Cette compréhension est nouvelle, seulement et entièrement faite de grâce et de gratuité. Il comprend que Dieu ne craint pas l'exil, et qu'il n'y a pas de meilleur endroit pour le chanter et le louer que les fleuves de Babylone. Et la question : « Comment chanter les chants du Seigneur dans un pays étranger ? », trouve une nouvelle réponse : chante-les exactement comme tu les chantais à Sion : je vis aussi ici, et je ne t’ai jamais laissé seul. C’est alors que commence la fin de l'exil.
Pour certains, ce nouveau psaume est leur dernier chant, entonné avec l'ange de la mort. D'autres le chantent depuis de nombreuses années, mais ils ne s’en sont pas encore aperçu car ils le confondent avec les lamentations du deuil. Tous les juifs exilés ne sont pas revenus de Babylone après l'édit de Cyrus. Une partie ne s'est jamais remise de ce grand deuil, et s'est laissé mourir. Certains se sont intégrés aux Babyloniens, et ne sont jamais revenus. Au bout de soixante-dix ans, seuls sont revenus les enfants et les petits-enfants des quelques uns qui avaient réussi à reprendre les cithares accrochées aux saules le long des rivières pour entonner les chants de Sion en terre étrangère. Ceux qui ont appris à jouer en exil sont revenus. Tout deuil se termine vraiment quand on parvient de nouveau à chanter. Les plus beaux psaumes d'Israël ont été composés lorsque certains de ces exilés ont trouvé les énergies spirituelles pour reprendre en main leur cithare. Ils les ont décrochées des arbres et se sont remis à chanter. On sort de l’exil en apprenant à chanter les airs d’antan dans un pays inconnu, lorsqu’avec un cœur renouvelé on reprend la cithare d’autrefois pour en jouer et que naissent d'autres chants.
Il y a des cantiques spirituels, des poèmes, des œuvres d'art, des prophéties qui naissent aux heures de joie et de lumière, qui jaillissent comme un débordement du cœur aux jours merveilleux de la vie : lorsque nos gestes et nos paroles bien maîtrisés obéissent à notre inspiration créatrice. Il peut s'agir d'authentiques œuvres d'art, de très belles musiques, de véritables poèmes, de vraies prophéties. Mais il y a d'autres cantiques spirituels, d'autres œuvres d'art, d'autres prophéties qui ne naissent pas ainsi. Ces œuvres ont besoin de langues collées au palais, de cithares accrochées aux peupliers, de douleurs arthritiques aux mains, de compositeurs sourds, de peintres aveugles, de voix spasmodiques et hésitantes, d'écrivains qui parlent de Dieu quand ils ne savent plus ni qui Il est, ni s'Il existe vraiment. Ces œuvres différentes ne sont pas le fruit de notre force mais de notre faiblesse, ces paroles ne nous obéissent pas car elles sont libres, ces gestes ne sont pas les nôtres, ce Dieu n'est pas notre Dieu, ce paradis est pour les autres. Telles sont les œuvres de la gratuité, des chants qui n'auraient pas dû advenir, la spiritualité qui émeut le ciel, l'humain qui frôle les anges. Nous avons la Bible parce que quelqu'un a réussi à chanter en exil, s’est remis à jouer de la cithare le long des rivières de Babylone. Sans jamais s’arrêter.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 04/10/2020
« Si grande soit-elle, la douleur liée à la perte d’un être cher nous impose immédiatement d'éviter la perte la plus irréparable et la plus décisive : celle de nous-mêmes. C'est pourquoi, dans la mort de l'être aimé, nous sommes impérativement appelés à devenir des procureurs réclamant la mort de cette mort même. »
Ernesto de Martino, La mort et les pleurs rituels dans le monde antique
Le psaume 137, celui de l'Exil, nous livre un message très éclairant sur les raisons et la façon de reprendre, avec un cœur renouvelé, les cithares d’autrefois.
Notre époque traverse une longue éclipse des lieux, et donc du sens de la terre. Avec le désenchantement progressif du monde, nous avons non seulement cessé de croire que la terre était habitée par les dieux, mais nous avons aussi oublié que les lieux ont une âme, différente, mais non moins vivante et réelle que celle des hommes. Nous avons inventé l'espace, l'espace anonyme et rationnel des cartes géographiques, et nous n'avons donc pas appris à reconnaître les lieux, ni leur vocation unique, ni leur message, ni leur destin. Dans la Bible, Dieu est une voix qui parle dans des lieux. Dieu n'est pas utopique, car il a sa place : un autel, une montagne, un temple. Des lieux qui ne l’emprisonnent (Dieu reste libre des siens comme des nôtres), mais qui conservent à jamais les signes de sa présence. L'homme biblique peut être nomade et se déplacer car son territoire est marqué par une présence authentique de Dieu : c’est un pèlerin qui n’est jamais désorienté. Le lieu est plutôt l'ami du temps, ce qui n’est pas le cas de l’espace, car on peut le situer avec précision : dans cette communauté, dans cette famille, dans cette région, où la vie se transmet depuis des générations. Et les biens communs ne disparaissent tant qu’ils deviennent des lieux et ne se réduisent pas à des espaces.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire 19/04/2020
Enfermé
parmi les choses mortelles
(et le ciel étoilé passera lui aussi )
pourquoi est-ce que je me languis de Dieu ?Giuseppe Ungaretti, Damnation
La prière est une dimension essentielle et universelle de la vie humaine. Le quatrième psaume nous le révèle et nous offre un sentiment de grande espérance en ces temps difficiles.
« A mon cri, tu es, mon Dieu, la réponse qui sauve ! Des espaces étroits, conduis-moi dans les espaces libres ; aie pitié de moi, écoute ma prière » (Psaume 4, 2). Des espaces étroits, sauve-moi, ô mon Dieu. Les mots s’apprennent un à la fois. Dans nos espaces devenus soudainement confinés en période de pandémie, nous pouvons comprendre la métaphore par laquelle commence le psaume 4. Peut-être que seuls ceux qui sont habitués à des horizons dégagés et se trouvent dans un confinement forcé découvrent la valeur infinie des "espaces sans fin".
[fulltext] =>Ce psaume est la prière d'un homme qui traverse une grande difficulté qui le met à l’étroit : «Fils des hommes, jusqu'où irez-vous dans l'insulte à ma gloire, * l'amour du néant et la course au mensonge ? » (4,3). Jusqu'à quand ? C'est la question, fréquente dans la Bible, de ceux qui se trouvent dans un état d'angoisse continue. C'est la question de la sentinelle qui au cœur de la nuit attend l'aube encore lointaine; de celui qui, pris au piège, plongé dans le malheur, ne peut que demander à Dieu et à la vie : jusqu'à quand ? A quand la fin de la journée ? Quand cette violence prendra-t-elle fin ? Cet homme en prière a été attaqué par des calomniateurs, par des menteurs qui l'accusaient de fautes inexistantes et graves. L'homme du psaume est une victime.
Le mot clé est la gloire : kavod/kabod en hébreu. C'est l'un des plus importants de la Bible, de sa théologie, qui dans le psaume devient aussi un mot de son anthropologie. Cet homme se sent offensé dans sa gloire, il se sent dépouillé de son honneur (synonyme de gloire). La gloire, c'est ce que l'on voit, ce qui apparaît, elle est donc en lien avec le regardes autres. C'est un mot qui appartient au registre de la vue. Pour l'homme de l’antiquité, beaucoup plus que pour nous, l'identité est intrinsèquement relationnelle. Je suis ce que les autres peuvent voir et reconnaître. La réputation est une dimension fondamentale de la vie, tout comme l'honneur et la gloire. En même temps, la négation de l'honneur est un déni qui porte atteinte à l’intimité : même s'il s'agit de voir, l'honneur ne relève en rien de l'apparence mais concerne l'être, c'est un attribut de l'âme. C'est pourquoi les calomnies et les mensonges qui ôtaient l'honneur et la gloire dépouillaient les hommes et les femmes de leur dignité. Hier tout comme aujourd'hui, l’ honneur est atteint quand il y a privation d’emploi, la réputation disparaît avec la faillite de l'entreprise. L'honneur est peut-être la réalité qui nous est le plus intime, mais en même temps la plus sensible et la plus dépendante des paroles et du regard d’autrui. C'est le mystère de la personne, qui vit dans un lien essentiel entre l'intérieur et l'extérieur. La relation, en raison même de sa nature, rend la personne humaine radicalement vulnérable et exposée au regard de l'autre. Car si je suis "ce que tu me fais", alors "tu me fais souffrir" peut atteindre la même intensité que "tu me fais du bien".
Dans la Bible, kavod renvoie à la notion de poids. La gloire de Dieu a du poids parce que YHWH est consistant, parce qu’il est vrai. A son opposé il y a le vide, le vent, la vanité, l’hevel de Qoelet, qui n’a pas de poids parce que privé de consistance. Kavod est le contraire de Hevel. L'idole relève du néant (l'autre registre sémantique de Hevel chez les prophètes), elle n’a pas de poids, elle n'est pas digne de gloire car elle n'a pas de substance. Dans le monde de l’antiquité juive, seul existe ce qui a du poids. Dieu est esprit et pourtant sa gloire a du poids.
Ce psaume nous rappelle cependant que l'homme a aussi sa gloire, et pas seulement Dieu. Tout refus de respecter l'honneur et la gloire de l'autre commence par la négation de sa consistance, de sa valeur - les premières pièces [de monnaie] servaient à mesurer le poids (lire, talent...). Sur terre, chaque personne a le même poids moral, aucun homme ne pèse plus ou moins qu'un autre, car l'honneur de chaque être humain est infini.
C'est pourquoi la Bible utilise le même mot pour désigner la gloire de Dieu et la gloire de l'homme. Pour comprendre cela, il faut revenir à la Genèse. Dans l'humanisme biblique, Adam possède gloire, honneur, poids, kavod, des attributs d’abord propres à Dieu qui les transmet dans son acte créateur. L'homme doit être respecté et honoré parce qu'il a du poids aux yeux de Dieu. Il est "l'image et la ressemblance" d'Elohim, et l'image d'une valeur infinie a une valeur infinie. C'est une image qui a du poids parce qu'elle est cohérente, parce que ce n'est ni une ombre , ni du vent. C'est ce qui pèse le plus "sous le soleil". En même temps, déshonorer l'homme, c'est déshonorer Dieu ; refuser aux hommes et aux femmes leur gloire, c'est la refuser à Dieu. Car s'il est vrai que nous avons appris à glorifier et à honorer les gens en glorifiant et en honorant Dieu, il est tout aussi vrai que c'est en regardant la dignité et l'honneur des êtres humains que nous avons appris à reconnaître la dignité et l'honneur de Dieu - la religion d'un peuple est aussi un indicateur de son humanisme : les paroles de vérité les plus belles et les plus nobles sur Dieu ne viennent que des communautés capables d’exprimer de belles et nobles paroles sur les hommes et les femmes. Et lorsque les paroles bienveillantes envers Dieu ne sont pas accompagnées de paroles tout aussi bienveillantes envers les hommes et les femmes, les religions deviennet perverses : pour honorer les dieux, elles humilient les êtres humains. Dieu est la gloire de l'homme, l'homme est la gloire de Dieu.
On ne devrait donc pas être surpris de retouver le même mot (kavod) au cœur du Décalogue : « Honore ton père et ta mère » (Dt 5, 16). Honore, glorifie, donne du poids à tes parents : souviens-toi que dans ce cas aussi tu es une créature. Pendant cette pandémie, malgré toutes les erreurs, nous avons vraiment essayé d'honorer nos pères et nos mères. Nous ne les avons pas considérés comme un fardeau, mais nous leur avons donné du poids. Et, sans le savoir, en rétrécissant ensemble nos espaces, nous avons redécouvert et ressuscité l'espace collectif et le bien commun du quatrième commandement - nous avions oublié la Bible, mais la Bible ne nous avait pas oubliés.
Job, au point culminant de sa nuit, s'est exclamé : « Il m'a dépouillé de ma gloire ! » (Jb 19, 9). Ce cri de Job s'adresse à Dieu, qu'il considère comme son bourreau. Et s'il y a toujours beaucoup de gens qui, aujourd'hui comme autrefois, crient vers Dieu pour lui imputer la perte de leur honneur, et ne perdent donc pas leur foi (la Bible leur réserve une place importante), le Psaume 4 nous montre une autre forme de cri, le cri de celui qui, au milieu du malheur, sent que Quelqu'un croit encore à sa gloire et à son honneur : « Sachez que le Seigneur a mis à part son fidèle, le Seigneur entend quand je crie vers lui.» (4, 4). La foi, c'est aussi la certitude que lorsque plus personne ne voit notre dignité, il existe encore un endroit où elle n’a pas perdu un gramme de son poids . C'est là qu'émerge la nature du don de la foi : retrouver au fond de notre âme ce regard qui reconnaît notre honneur bafoué par tous, sentir que quelqu'un contemple notre gloire alors que d'autres n’y voient que vanité, voilà un héritage qui n’a pas de prix.
Beaucoup de gens traversent leur vie accompagnés de quelques regards différents - au moins un - capables de reconnaître une dignité, un honneur et une gloire que les autres ne voient pas. Sans ces regards particuliers, la vie serait trop triste pour être supportée. Mais nous savons tous que la platitude du regard de ceux qui nous entourent n'est pas éternelle. Certains nous quittent, "changent" de regard, se perdent ou nous les perdons ; quant aux quelques uns qui ont la chance de mourir accompagnés par l’un de ces regards bienveillants, ils comprennent aussi, pour autant qu’ils aient mené une vie assez longue et authentique, qu'aucun regard humain ne peut rejoindre le plus profond de leur âme - pas même le leur. C'est l’espace où sont conservés nos premiers et nos derniers mots, l’espace où demeurent les douleurs jamais avouées, les joies ineffables, les chagrins trop délicats et trop précieux pour pouvoir être racontés, même à notre cœur.
C'est dans ce "sanctuaire de l’âme" que le regard de la foi peut pénétrer. Prier, c'est se retrouver dans les conditions de douceur qui permettent à ce regard différent de nous atteindre dans cette secrète demeure intérieure. Avant de demander, de supplier, d'implorer, de rendre grâce, la prière consiste à être rejoint et perçu dans une intimité autre. Même celui qui n'attribue pas ce regard à Dieu, peut parfois l’éprouver «dans la meilleure et la plus profonde partie de mon être, celle que j'appelle Dieu » (Etty Hillesum). Chaque personne peut se sentir touchée dans cette profondeur insondable. Le monde serait trop injuste si seuls ceux qui ont reçu le don de la foi se sentaient rejoints dans cet abîme du cœur. Les priants sont beaucoup plus que les croyants, car faire l'expérience de Dieu est quelque chose de très différent du nom sous lequel nous l'appelons. Je ne serais pas intéressé par un Dieu qui ne prêterait attention qu’à ceux qui le regardent, parce qu'Il serait moins digne que ces pères et ces mères qui continuent toute leur vie à regarder et à appeler par leur nom les enfants qui les ont oubliés et ne qui ne les appellent plus. Cela aussi, c’est la fraternité universelle.
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La prière est une dimension essentielle et universelle de la vie humaine.
Le Psaume 4 nous la révèle et nous offre un sentiment de grande espérance en ces temps difficiles.
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«Tu mets dans mon coeur plus de joie que toutes leurs vendanges et leurs moissons.» (4, 8). Le bonheur qui vient d'une intériorité habitée est peut-être la plus grande des richesses. Ceux qui se sont retrouvés ces jours-ci aux urgences, sans affection, sans amis, sans certitudes le savent bien. Et là, dans ces abîmes de solitude et de peur, ils ont soudain senti émerger en eux la spiritualité cultivée au cours de toute une vie. Cultivée pour qu'elle puisse s'épanouir dans ces moments terribles, pour beaucoup les derniers, où elle devient un bien qui n'a pas d’équivalent. Qui sait combien d'anges invisibles, mêlés aux démons, remplissent nos hôpitaux. . Certains ont vu ces anges et les ont reconnus, car ils ne les avaient pas chassés après leur jeunesse, lorsque les anges et Dieu disparaissent facilement. Parce qu'ils les avaient suppliés de rester quelque part dans leur cœur d'adulte, ils les ont attachés à leur table de chevet avec le dernier Ave Maria dont ils se souvenaient et qu'ils n'avaient jamais cessé de réciter. Nous pouvons tout oublier, mais nous ne devons pas oublier toutes les prières, car l'une d'entre elles nous aidera à dire notre dernier Amen : « Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors, car tu me donnes d'habiter, Seigneur, seul, dans la confiance.» (4, 9).L'âme et la cithare/4 - Comprendre la gloire de Dieu et celle de l'homme
par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire 19/04/2020
Enfermé
parmi les choses mortelles
(et le ciel étoilé passera lui aussi )
pourquoi est-ce que je me languis de Dieu ?Giuseppe Ungaretti, Damnation
La prière est une dimension essentielle et universelle de la vie humaine. Le quatrième psaume nous le révèle et nous offre un sentiment de grande espérance en ces temps difficiles.
« A mon cri, tu es, mon Dieu, la réponse qui sauve ! Des espaces étroits, conduis-moi dans les espaces libres ; aie pitié de moi, écoute ma prière » (Psaume 4, 2). Des espaces étroits, sauve-moi, ô mon Dieu. Les mots s’apprennent un à la fois. Dans nos espaces devenus soudainement confinés en période de pandémie, nous pouvons comprendre la métaphore par laquelle commence le psaume 4. Peut-être que seuls ceux qui sont habitués à des horizons dégagés et se trouvent dans un confinement forcé découvrent la valeur infinie des "espaces sans fin".
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 27/09/2020
« Les encouragements de mes amis me procuraient le plus grand réconfort et le plus grand soulagement... les conversations, les rires en bonne compagnie, l'échange de civilités affectueuses, les désaccords occasionnels, sans rancune, comme ceux de tout homme avec lui-même, qui viennent pimenter les consensus trop faciles; cette façon d’être tantôt disciples tantôt maîtres les uns des autres, la nostalgie impatiente de revoir ceux qui sont loin, l'accueil festif de ceux qui sont de retour. »
Augustin, Les Confessions, IV
Le Psaume 133 est connu comme celui de la fraternité, qui, tout en nous parlant de la beauté de la fraternité de sang, en annonce une autre, celle de l'esprit.
La fraternité est un mot biblique essentiel parce qu’il concerne la vie. C'est un synonyme de bonheur. Nos frères et sœurs font partie de notre environnement domestique et sont une composante essentielle de notre vie. L'amour que nous éprouvons pour eux ne relève ni de l’éros, ni de la philia (nous ne sommes pas toujours amis de nos frères et sœurs, pourtant nous les aimons beaucoup). C'est un autre amour, différent et spécial, qui utilise le langage de la chair et des entrailles (et en cela il ressemble à celui qu’on a envers nos parents). Une caractéristique de la fraternité est cette douleur viscérale que nous ressentons lorsqu'une sœur ou un frère tombe malade, souffre, est offensé ou humilié : pour nous les hommes, voir souffrir une sœur est l'une des plus grandes douleurs. Puis il existe une joie typique et très spéciale, peut-être l'une des plus grandes sur terre : c'est celle ressentie par les parents, surtout les mères, en voyant leurs enfants s'aimer, s'estimer, se consoler et se protéger les uns les autres, s'entraider, festoyer ensemble.
[fulltext] =>Il n'est pas surprenant que la Bible, pour évoquer la plus grande bénédiction et le plus grand bonheur de Job, parle de ses fils et de ses filles qui se réjouissaient autour de repas pris ensemble: « Or ses fils avaient coutume d’aller festoyer les uns chez les autres à tour de rôle, et ils faisaient inviter leurs trois sœurs à manger et à boire avec eux. » (Job 1, 4). Ici la référence aux sœurs est importante, car s'il est déjà beau de se retrouver entre frères pour festoyer, se réunir entre frères et sœurs l’est encore plus, car les filles et les femmes, avec le génie qui leur est propre, exaltent la grâce et le bonheur domestiques. La joie particulière de voir les enfants s’aimer augmente avec le temps, car s'il est beau de les voir s’entendre au cours de leurs jeunes années, il est encore plus beau de voir cette concorde se prolonger à l'âge adulte, lorsque les distances et les motifs de désaccords augmentent. C’est peut-être le plus grand bonheur que peuvent vivre un père ou une mère sur la fin de leurs jours ; tout aussi fort que l’amour réciproque, l’amour filial, lui aussi imprégné de toutes les nuances de l'agapè, pousse un fils à renoncer à des intérêts légitimes juste pour épargner à ses parents cette souffrance particulière.
On peut alors imaginer que le beau psaume 133 a été composé, ou du moins chanté, par une mère. Un jour de fête, peut-être le soir de Pesah, une femme a regardé ses enfants assis autour de la table, et du fond de son cœur a jailli cette prière, l'une des plus belles : « Oui, il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d'être unis ! » (Psaume 133, 1). Le psaume célèbre la fraternité. Le mot hébreu que le psalmiste utilise pour décrire cette beauté et cette douceur particulières est twb. Nous retrouvons ce terme dans le premier chapitre de la Genèse, à la fin de la création : « Et Dieu vit que c'était très twb. » (Gn 1, 31). Peut-être une manière de nous dire que lorsque des frères et sœurs « s'assoient ensemble », la famille se promène à nouveau dans le jardin d'Éden, que l'innocence et la pureté première sont de retour, que la mort est à nouveau vaincue, que nous mangeons le fruit de l'arbre de vie et vivons dans une é-ternelle jeunesse - tant que quelqu'un nous appelle "fils", nous sommes encore jeunes. Les deux métaphores que le psaume utilise pour développer le thème de la fraternité sont très belles et profondément ancrées dans le langage et le symbolisme bibliques : « On dirait un baume précieux, un parfum sur la tête, qui descend sur la barbe, la barbe d'Aaron, qui descend sur le bord de son vêtement. On dirait la rosée de l'Hermon qui descend sur les collines de Sion. » (133, 2-3). L'huile était le signe de la consécration du prêtre (Aaron), mais aussi du roi, du prophète, et c'est par ce geste qu’on accueille l'invité, qu’on l’honore par l’onction de son corps, fatigué du voyage, avec une huile parfumée. Une huile qui déborde, qui s'écoule de la tête pour ensuite couvrir le visage, la barbe, puis descendre le long de son vêtement.
Cette image exprime les prodigalités de la fraternité. Celle-ci est aux antipodes de l’avarice, si on ne donne pas notre manteau à notre propre frère, on ne lui donnera pas non plus notre tunique, parce que c’est tout ce que nous ne devrions pas donner et qu’au contraire nous leur donnons, qui révèle l’importance d’un frère ou d’une sœur. Cette image nous renvoie à l'huile qu'une femme a versée sur les pieds de Jésus, qui valait dix fois plus que le prix de la trahison. L'économiste parcimonieux ne peut comprendre ce gaspillage, et voit d’un mauvais oeil ces largesses qui ne rapportent rien. A un frère on prête sans intérêts, pas même au simple taux d'inflation pour rentrer dans ses frais. Quand il s’agit d’un frère, on donne sans hésiter: prêter est un verbe qui convient bien aux affaires, mais pas entre frères. – « Voici l'argent dont tu as besoin : tu me le rendras quand et si tu le peux. » Un frère a la même dignité que le roi, le prêtre et le prophète, pas moins ; et quand il vient nous visiter, il doit être honoré comme dans la Bible, comme Abraham et Sarah ont accueilli les trois hommes aux chênes de Mamré, comme Salomon la Reine de Saba, comme le bon berger du Psaume 23, comme les deux sœurs ont accueilli Jésus à Béthanie. Comme la veuve qui a accueilli Élie dans sa maison et a donné au prophète la dernière poignée de farine et la dernière goutte d'huile qui lui restaient. Aux prophètes, et aux frères, aux sœurs, on ne donne pas son superflu, mais le nécessaire, pour eux on se prive du dernier pain. Le pain quotidien est un don du Père, mais nous le recevons presque toujours de la main d'un frère, d'une sœur. Lorsque, devenus adultes, nous quittons la maison familiale et qu'un frère vient dans notre nouvelle demeure, il faut l’accueillir avec les honneurs que la Bible réserve aux invités. Et même s'il nous rend souvent visite, ce jour-là on met sur la table la plus belle nappe et un nouveau bouquet. Le temps s'arrête et touche l'éternité. Les heures passées avec nos frères sont plus longues, la fraternité prolonge notre vie. Chaque invité est porteur d’une bénédiction, mais celle donnée par un frère et une soeur, honorés comme des anges, a une portée infinie.
La deuxième image est celle de la rosée, un terme très prisé par la Bible. La rosée de la plus haute montagne, qui atténue les longues sécheresses. Il est toujours surprenant de trouver au réveil, dans nos étés torrides, l'herbe baignée d’une rosée qui nous offre une fraîcheur différente quand il n'y a pas d'eau. La rosée symbolise à merveille la gratuité, elle est là pour nous, pour tous. Comme la rosée, la fraternité a besoin d'une nuit paisible et sans vent pour inonder de lumière le champ de notre vie. Comme la rosée, la fraternité est cette fraîcheur offerte qui accompagne les aridités de la vie, qui arrive sans considérer nos vertus ni nos mérites. Aux yeux de nos parents ou de nos autres frères, la fraternité ne relève pas de la méritocratie : le frère aîné de la parabole est justement là pour nous rappeler que la méritocratie est une tentation de la fraternité, qui, si elle n'est pas vaincue chaque jour, produit différentes formes de fratricide.
L'huile qui coule de la barbe d'Aaron exprime alors un autre élément fondateur de la fraternité, qui est l'autre face de l'excès : le bon gaspillage. Comme d'autres mots essentiels à la vie, les déchets ont deux visages, un mauvais et un bon. Le bon gaspillage appartient à la fraternité, qui en vit elle aussi : gaspillage de temps, de paroles, de nourriture. La perte de temps fait fuir la précipitation, l'ennemi de toutes les relations primordiales. Le gaspillage des mots est une bénédiction pour ces soirées et de ces nuits interminables passées à dire avec cent mots ce que nous pourrions dire avec dix, car ces quatre-vingt-dix mots gaspillés sont ceux que nous échangeons libérés de l'esclavage de l'efficacité. Et il n'y a pas de fête familiale où la nourriture ne dépasse pas le nécessaire, où ce qui semble être du gaspillage n'est que la célébration d'un plus grand bien : il nous vient de loin ce langage ancien et très profond qui dit que ces heures passées ensemble valent plus que le PIB national, que ce bien relationnel est le plus grand bien. Dans les repas entre frères, si on ne mange pas trop, on ne mange pas assez. Et même lorsque la pauvreté ne nous offre que cinq pains et deux poissons, nous devons à la fin emporter sept corbeilles de restes.
Pourtant, malgré toute cette beauté, la Bible nous présente la fraternité naturelle comme quelque chose d'ambivalent, et de généralement problématique. Abel, le premier frère est un frère assassiné. Jacob et Ésaü se battent, se disputent et se séparent, puis Léa et Rachel, les deux sœurs rivales, puis Joseph vendu par ses frères, Jephté chassé par ses demi-frères, la violence d'Amnon sur Tamar, jusqu’au frère du fils prodigue. Dans la Bible, il y a peu de cas de frères et sœurs qui s'aiment comme dans le Psaume 133. C’est peut-être une façon de nous signifier que la fraternité de sang, aussi grande et merveilleuse soit-elle, ne suffit pas pour comprendre l'humanisme biblique, le peuple nouveau, l'alliance, la fraternité universelle, biblique puis chrétienne, nouvelle et différente. Ainsi, pour nous indiquer cette nouvelle fraternité, détachée des liens du sang, la Bible ne se contente pas de louer la fraternité naturelle, elle en montre les insuffisances. Nous savons aussi que la première fraternité naturelle ne réalise pas complètement notre humanité si elle ne s'épanouit pas dans une deuxième fraternité. On ne reste pas frère et sœur pour le reste de sa vie si, à un certain moment, ce lien de sang, déjà grand et beau, ne devient pas encore plus grand et beau en s'épanouissant dans l'agapè.
Nous demeurons frères et sœurs jusqu'à la fin si un jour nous devenons aussi des amis, des mères, des pères, les uns pour les autres. La fraternité est une aurore, c'est une rosée ; mais ce soleil ne garde pas toute sa lumière de l'aube à midi si le sang ne devient pas esprit, et si nous ne renaissons pas dans cet esprit. Mais la Bible a également voulu nous offrir le Psaume 133 et ses splendides versets, car si elle nous rappelle que la fraternité s'accomplit en mourant dans la chair et en ressuscitant dans l'esprit, ces frères et sœurs assis autour de la même table comptent parmi les réalités les plus belles qui puissent exister sous le soleil : « C'est là que le Seigneur envoie la bénédiction, la vie pour toujours. » (133,3).
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Publié sur Avvenire le 27/09/2020
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 20/09/2020
« Ce sont des "fils de la jeunesse" car celui qui était destiné à mourir entre vingt-cinq et trente ans devait se dépêcher d’engendrer. Un prix de consolation, celui de l’AT, du désert et des lances autour de la maison. Pour le philosophe, aujourd'hui comme hier, il n’y a rien que des clous dans la chair. »
Guido Ceronetti, Le Livre des Psaumes
Est-il possible d'associer Dieu à nos bénédictions et de le préserver des malédictions des autres ? Le remercier pour notre bonheur et ne pas le condamner pour notre malheur ?
La profusion est l'une des lois précieuses de la vie. Elle est tout à la fois la mère et la sœur de la générosité. On ne porte pas de fruits sans semer à la volée, sans qu’une bonne part de bon grain aille dans les épines, le long de la route et parmi les pierres, parce que si nous voulions semer uniquement dans ce que nous pensons être une bonne terre, rien de vraiment bon ne naîtrait. La bonne terre ne peut exister qu'entre les buissons et les rochers, et le geste énergique du semeur ne peut l’atteindre sans consentir à disperser, sans les compter, de nombreuses semences. Une communauté doit engendrer dix faux prophètes avant d’espérer en voir naître un vrai ; il faut former des milliers d’étudiants ordinaires pour en voir apparaître un excellent ; pour qu’advienne un acte d'amour agapè, nous devons attendre qu'il mûrisse au milieu de nos égoïsmes. Et une part de déperdition importante est nécessaire pour parvenir à un bon résultat. Toute avarice est stérile, toute magnanimité est féconde.
[fulltext] =>Mais la profusion la plus importante n'est pas celle qui sort de notre cœur, mais celle qui y entre : c'est celle que nous recevons et non celle que nous donnons, celle que nous voyons se répandre en nous et autour de nous, tel ce pain qui nous nourrit et nourrit nos amis "pendant notre sommeil". Il arrive un jour où nous comprenons enfin que les bénédictions qui ont accompagné notre vie ne sont pas le fruit de notre engagement, mais seulement et entièrement des dons, des grâces, uniquement et toujours providentielles. Notre intelligence, nos talents prometteurs, notre vie de couple, nos enfants, nos amis, notre communauté, notre santé, le sens et la joie de la vie intérieure, s’émouvoir à la lecture d’un poème ... sont autant de réalités qui ne sont pas entrées dans notre vie en raison de nos mérites : elles nous ont simplement trouvés dans le sillage d'une mystérieuse liberté amoureuse. Être une "bonne terre" ne relève pas notre mérite – celle-ci ne se cultive pas, ne s'entretient pas et ne se fertilise pas toute seule. Elle est tout simplement là. C'est la première racine de la gratitude.
Cette surabondance est au cœur des Psaumes 127 et 128, qui sont au centre de la série (120 à 134) dite "du pèlerin" : « Si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain ; si le Seigneur ne garde la ville, c'est en vain que veillent les gardes. En vain tu devances le jour, tu retardes le moment de ton repos, tu manges un pain de douleur : Dieu comble son bien-aimé quand il dort. » (Psaume 127, 1-2). Dans ces beaux et célèbres versets, le psalmiste affirme la priorité de la profusion de la grâce sur nos mérites. Cet incipit, cette succession de "en vain" qui rappelle tant le Qoelet (un livre que la Bible attribue, comme le Psaume 127, à Salomon) est l'une des plus belles explications de ce que sont la gratuité et la grâce. Pour comprendre cela, il faut continuer à lire la deuxième partie du Psaume 127 et ensuite enchaîner avec le Psaume 128 : « Des fils, voilà ce que donne le Seigneur, des enfants, la récompense qu'il accorde ; comme des flèches aux mains d'un guerrier, ainsi les fils de la jeunesse. Heureux l'homme vaillant qui a garni son carquois de telles armes ! » (127, 3-5).
Nous retrouvons ici le grand thème biblique de la bénédiction, développée dans le psaume suivant : « Heureux qui craint le Seigneur et marche selon ses voies ! Tu te nourriras du travail de tes mains : Heureux es-tu ! A toi, le bonheur ! Ta femme sera dans ta maison comme une vigne généreuse, et tes fils, autour de la table, comme des plants d'olivier. Voilà comment sera béni l'homme qui craint le Seigneur. » (128, 1-4). Le bonheur biblique, contrairement à la tradition moderne qui l'associe au plaisir et aux sensations, fait référence à la fécondité et à l’engendrement, également présents dans le latin felicitas (dont le préfixe fe rapproche des mots fœtus, femme, fertile).
Mais ces deux psaumes contiennent bien plus que cela. Il y a une idée théologique fondamentale dans la Bible, selon laquelle le bonheur, et donc les biens et les enfants, sont des bénédictions de Dieu. Cette équivalence entre le bonheur terrestre et la bénédiction divine est non seulement fondamentale et centrale dans l'éthique et l'esprit de l'économie moderne, mais elle est également au cœur du bon sens et de la sagesse des communautés et des familles - le Psaume 128 est le plus lu dans les liturgies juives et chrétiennes du mariage.
Mais c'est précisément dans cette splendide série de béatitudes que se cachent les pièges qui sont toujours au cœur de l'humanisme occidental. Trop souvent, en fait, nous avons lu et relu ces deux psaumes amputés des deux premiers versets du psaume 127, et ainsi tout le discours sur la bénédiction s’en trouve faussé et dévoyé. Dans la Bible, on peut parler des biens comme d'une bénédiction parce qu'ils sont précédés par la certitude morale qu'à un niveau beaucoup plus profond, les biens sont un don. Dire que ceux qui "construisent la maison" n’en sont pas les constructeurs mais que c’est le "le Seigneur", c'est reconnaître que même dans les réalités les plus concrètes et les plus quotidiennes, où il est évident que c'est nous qui, par notre travail, ajoutons, à un niveau plus profond et donc plus vrai, pierre sur pierre, celles-ci et notre sueur sont de l’ordre de la grâce, qu’elles sont providentielles.
Et nous devons reprendre ici un discours jamais conclu sur les mérites et la grâce. Lorsque nous voyons que, d’une manière ou d’une autre, une personne a réussi, , il est très rare de ne pas lui reconnaître une part de mérite personnel dans cette réussite . Ainsi, sans négliger le rôle de la chance et des circonstances favorables, nous prenons la part de mérite présente dans cette réussite et en faisons le socle sur lequel nous édifions l'ensemble de la structure sociale des récompenses. Ensuite, par souci de symétrie, nous suivons la même logique pour les échecs et les défaillances, car même si des circonstances malheureuses et défavorables se cachent derrière un crime ou un malheur, il s’y trouve aussi un certain pourcentage de culpabilité subjective. Nous l'isolons et en faisons le principal critère qui régit les sanctions et l’ordre social. Il n'est pas exclu que nos sociétés ressentent le besoin d'un système de blâmes pour légitimer les mérites, car dans un monde où l'on dit que le malheur dépend trop des circonstances malheureuses et trop peu de la culpabilité subjective, il n'y aurait même pas de base éthique pour attribuer nos succès à nos mérites.
Mais c'est précisément là que les deux premiers versets du psaume 127 prennent toute leur importance. Prenons le cas de John, ce collègue économiste particulièrement brillant. Il a fait carrière et connu le succès et la richesse. Issu d'une famille pauvre, il a dû beaucoup étudier pour obtenir son diplôme puis son doctorat. Ses parents ont fait des sacrifices pour lui permettre d’étudier, d'abord en Italie, puis aux États-Unis. Il a réussi de nombreux concours et s'est avéré être toujours le meilleur... Il est difficile de ne pas attribuer une bonne ou une grande partie de son succès à son mérite. Mais en y regardant de plus près, on découvre que même ce raisonnement, à première vue évident et peu discutable, peut s’avérer plus complexe et susceptible d’être reconsidéré : on se rend compte que Giovanni est né dans une famille qui l'aimait, puis qu’ il a étudié gratuitement pendant plus de vingt ans, qu’il a eu d'excellents professeurs qui ont cru en lui, qu’il a grandi dans un environnement serein et gratifiant. Et s'il a beaucoup étudié pour réussir des concours et écrire des articles scientifiques, sa capacité à étudier et à s'engager était aussi en grande partie un don qu’il a trouvé en lui comme le fruit de tout cette profusion de vie - on devient pauvre, entre autres, parce qu'on n'a pas la possibilité de s'engager.
Si John avait grandi ailleurs, ce même ADN n'aurait pas bénéficié des conditions lui permettant d’étudier et de réussir. Tout cela non pas pour diminuer, mépriser ou dévaloriser ses talents et sa vertu, mais pour souligner qu'il y a d'abord autre chose : la présence d’une surabondance qui a construit pour lui et avec lui sa "maison" et, encore en amont, ses talents.
Lorsque nous oublions ce bâtisseur invisible - et nous le faisons de plus en plus - les théologies, les sociologies et les économies de la prospérité naissent trop vite, et, tout en louant et légitimant les succès et les mérites sur le plan éthique et religieux, elles délégitiment religieusement les perdants, et finissent par considérer l’absence de talents comme une absence de mérites, au point de justifier moralement l'inégalité ; et pour pouvoir dire que ceux qui gagnent sont bénis, elles doivent dire qu’une malédiction pèse sur ceux qui ne réussissent pas.
Mais on ne peut pas s'arrêter là. Tout ce discours n’est pas satisfaisant. Ma petite-nièce Antoinette me l'a fait comprendre avec sa théologie basique lorsque nous avons dit la prière avant le repas : « Nous remercions Dieu pour la nourriture, mais comment les enfants qui n'ont pas de quoi manger prient-ils ? » Rendre grâce à Dieu et à la vie pour des bénédictions que nous avons sans mérite ne suffit pas à justifier Dieu aux yeux de ceux qui en sont dépourvus. Tout homme religieux qui attribue ses bénédictions à Dieu tend (presque) inévitablement à séparer Dieu de ceux de ceux qui vivent dans la misère. « Ma mère m’a envoyée me prostituer dès l'âge de huit ans : si je rencontre Dieu, j'ai envie de lui cracher au visage », a déclaré désespérément une jeune Brésilienne à un ami missionnaire. Si j'associe la grâce de Dieu aux dons que j’ai reçus, comment puis-je le délier du malheurs des autres ?
Un certain athéisme honnête est né parce qu'il ne trouvait pas de réponse convaincante à cette question, et a préféré tuer Dieu pour sauver les pauvres. Quelques autres ont réussi à garder la foi, mais ils ont lu ces psaumes assis aux côtés de Job, sur son tas de fumier, ou sur le mont Golgotha, au pied du Crucifié. Et puis un jour, qui arrive toujours trop tard, ils se sont rendu compte que leur véritable salut était d'avoir enfin compris qu’ils avaient reçu des richesses et des talents pour libérer ceux qui n'ont en héritage que souffrances et misères. Ils ont alors éprouvé un besoin irrésistible de descendre dans les rues et sous les arcades pour servir des petits-déjeuners, pour essayer de faire jaillir des cœurs quelques vrais « mercis » après trop d'imprécations. Et tandis qu’ils se donnaient sans réserve aux pauvres, ils leur disaient : vous n'êtes pas maudits. Il est urgent de le dire, de le répéter, sans jamais s’arrêter, jusqu'à donner sa vie.
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Notre richesse et nos talents servent à libérer ceux qui vivent dans la souffrance et le malheur.
par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 20/09/2020
« Ce sont des "fils de la jeunesse" car celui qui était destiné à mourir entre vingt-cinq et trente ans devait se dépêcher d’engendrer. Un prix de consolation, celui de l’AT, du désert et des lances autour de la maison. Pour le philosophe, aujourd'hui comme hier, il n’y a rien que des clous dans la chair. »
Guido Ceronetti, Le Livre des Psaumes
Est-il possible d'associer Dieu à nos bénédictions et de le préserver des malédictions des autres ? Le remercier pour notre bonheur et ne pas le condamner pour notre malheur ?
La profusion est l'une des lois précieuses de la vie. Elle est tout à la fois la mère et la sœur de la générosité. On ne porte pas de fruits sans semer à la volée, sans qu’une bonne part de bon grain aille dans les épines, le long de la route et parmi les pierres, parce que si nous voulions semer uniquement dans ce que nous pensons être une bonne terre, rien de vraiment bon ne naîtrait. La bonne terre ne peut exister qu'entre les buissons et les rochers, et le geste énergique du semeur ne peut l’atteindre sans consentir à disperser, sans les compter, de nombreuses semences. Une communauté doit engendrer dix faux prophètes avant d’espérer en voir naître un vrai ; il faut former des milliers d’étudiants ordinaires pour en voir apparaître un excellent ; pour qu’advienne un acte d'amour agapè, nous devons attendre qu'il mûrisse au milieu de nos égoïsmes. Et une part de déperdition importante est nécessaire pour parvenir à un bon résultat. Toute avarice est stérile, toute magnanimité est féconde.
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Par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 13/09/2020
La question de savoir comment j’en suis arrivé à aborder un sujet aussi archaïque n'a pas encore trouvé de réponse. Il y a eu l’influence de divers facteurs, liés aux années, à l'âge. La maturité, c'est tout. En tant qu'homme et en tant qu'artiste, j'ai dû me trouver, d'une manière ou d'une autre, dans un état de "réceptivité".
Thomas Mann, Joseph et ses frères (appendice)
Dans l'interdiction de se faire une image de Dieu, se cachent des questions de grande importance humaine et religieuse. Le Psaume 115 nous en révèle quelques-uns.
[fulltext] =>La Bible a préservé le mystère intime de Dieu au cours des siècles, à l'abri de nos manipulations théologiques et idéologiques : ce fait est à lui seul un motif suffisant d’immense reconnaissance envers elle. L'exil babylonien n'a pas seulement été le lieu et l'époque où sont nés certains des plus grands livres bibliques et où d'immenses prophètes tels qu'Ézéchiel et le second Isaïe ont parlé et écrit. Cet exil a également vu apparaître certains des plus beaux psaumes. Des chants et des prières ont jailli de l'âme d'un peuple humilié, offensé dans son identité nationale, frappé au cœur de sa religion. L'Exil comporte beaucoup d’éléments, mais c'est surtout une grande épreuve spirituelle. Se retrouver sur une terre religieuse au possible, entouré de nombreux dieux (chacun d’eux ayant son propre sanctuaire), de divinités représentées par de magnifiques statues et portées en triomphe lors de grandes processions, a obligé Israël à repenser profondément sa foi. La dure controverse biblique contre l’idolâtrie s'est également développée pendant l'Exil. L'absence du temple et de représentations de YHWH a terriblement amplifié la question que les Babyloniens posaient non sans ironie aux Juifs : « Où est votre Dieu ? »
Dans les cultures antiques, un Dieu sans lieu n’existait pas. En réponse à cette terrible question, la grande idée biblique de l'interdiction de représenter Dieu est arrivée à son terme (Ex 20, 4). Une interdiction unique et fondée sur un événement décisif : «… Puisque vous n’avez vu aucune forme le jour où le Seigneur vous a parlé à l’Horeb du milieu du feu.» (Dt 4,15). L'expérience de la rencontre avec YHWH fut celle d’entendre une voix, quelque chose de réel mais d'invisible. Ni Abraham, ni Moïse, ni les prophètes n'ont vu l'image de Dieu - Moïse l'a vue passer, une façon de dire qu'il ne l'a pas vue. En revanche ils ont entendu sa voix, son murmure (Élie). Alors toute tentative de faire voir Dieu ne peut être que fausse, car la voix ne peut être représentée.
« Pourquoi les païens diraient-ils : "Où donc est leur Dieu ? " Notre Dieu, il est au ciel ; tout ce qu'il veut, il le fait. Leurs idoles... ont une bouche et ne parlent pas, des yeux et ne voient pas, des oreilles et n'entendent pas, des narines et ne sentent pas. Leurs mains ne peuvent toucher, leurs pieds ne peuvent marcher, pas un son ne sort de leur gosier ! » (Psaume 115, 2-7). Le combat de la Bible contre l’idolâtrie a deux composantes : une critique dirigée vers l’extérieur dénonçant les représentations des dieux des autres peuples et une critique destinée au peuple juif qui a toujours été tenté de se faire des images de Dieu. La critique du psaume 115 semble, à première vue, toute centrée sur le premier combat qui ridiculise les peuples qui adorent de stupides morceaux de bois. Ce n'est cependant pas le point le plus intéressant et le plus profond de la controverse biblique, car si elle avait été formulée en présence de prêtres et de prophètes babyloniens, ils auraient pu répondre que ces images n'étaient que des symboles et des signes de leurs dieux qui, comme le Dieu d'Israël, "habitent au ciel". Ils auraient pu utiliser des arguments semblables à ceux que les catholiques ont avancés pour défendre les statues de saints contre la fureur iconoclaste de certains mouvements réformistes protestants. La critique biblique des images ressurgit encore de nos jours quand on oublie que les statues et les icônes sont les signes d'un Dieu que l'on ne voit pas et que l'on reconnaît à une voix qui prononce un nom : "Marie".
La deuxième critique, celle qui vise le peuple d’Israël, est beaucoup plus importante. Tout au long de leur histoire, les hébreux ont été tentés d'avoir une religion aussi simple que celle des autres peuples, avec les mêmes statues et processions, les mêmes rites naturels de fécondité. Le veau d'or sous le Sinaï est condamné puis détruit par Moïse parce qu'il est l'image de leur Dieu - le nom que le peuple avait donné au veau d'or était : YHWH. Représenter un Dieu invisible ne peut que produire des images déformantes. Le combat le plus important qu'Israël a mené contre l’idolâtrie n’est pas la critique des autres peuples mais sa lutte pour protéger sa propre foi qui était non seulement menacée (surtout avant l'exil) par les tentatives d'importation de dieux étrangers (les cultes de Baal ou de la déesse "épouse" de YHWH) et de les placer dans leur temple, mais par la tentation de simplifier leur foi. L'idolâtrie la plus efficace consiste à réduire l’expérience religieuse, ce qui engendre également une réduction anthropologique.
À l’arrière-plan de toute la réflexion biblique à propos des idoles, il y a la Genèse, et en particulier ces merveilleux versets qui présentent Adam créé à « l'image de Dieu » (1, 27). Si nous, les humains, créés à l'image de Dieu, nous réduisons Dieu en le représentant inévitablement de manière fausse, nous en sortons encore plus amoindris, nous qui sommes l'image de cette image déformée. Maintenir YHWH dans les hauteurs célestes, invisible mais en train de nous parler, revient à sauvegarder la très haute la dignité des femmes et des hommes ; et c’est aussi dire que l'image de Dieu que nous portons en nous appartient au royaume de l'esprit et de l'être, et non à celui des apparences. Quiconque voit un homme, une femme, un enfant ne voit pas une statue de Dieu, mais une véritable étincelle de son mystère invisible. Ici, l'essence de l'image est vraiment invisible pour les yeux. Le sens de la vue n'est pas nécessaire pour voir cette image. Le début du psaume est important : « Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom, donne la gloire, pour ton amour et ta vérité. » (115, 1). Ici apparaît un thème très cher à la Bible : le Nom. A l'approche de l'ère chrétienne, les Juifs prononçaient de moins en moins le nom YHWH (Ex 20, 7). Ils écrivaient le tétragramme (YHWH) mais prononçaient "Adonaï", Seigneur. Le nom YHWH était prononcé par le prêtre uniquement dans le temple, peut-être seulement lors de la fête de Kippour. Avec la seconde destruction du temple (70 après J.C.), le souvenir de la prononciation du Nom révélé à Moïse s’est également perdu. Mais qu' y a-t-il derrière ce Nom ?
Ces exilés avaient une grande nostalgie de l'expérience de Dieu faite dans leur patrie, lorsque YHWH "habitait" son temple désormais détruit. Ils firent énormément d’efforts pour retrouver l'expérience du sacré sans avoir de lieu sacré. Mais de cet immense effort sont nées plusieurs réalités extraordinaires. Tout d'abord, en l’absence du temple sacré est apparu le temps sacré : le Shabbat est né. Le temps est devenu plus important que l'espace. Le Shabbat est devenu le temple du temps, et il reste encore l'une des plus grandes prophéties de la Bible. Sans une nouvelle culture du Shabbat, nous ne sortirons jamais des crises environnementales et sociales du capitalisme, qui est l'anti-Shabbat. C’est également à cette époque qu’Israël a découvert une nouvelle dimension du Nom, qu'ils ont apprise grâce aux prophètes, les sentinelles de l'Exil (On retrouve Ézéchiel dans le Psaume 115 : « ... Dit le Seigneur : Mais j'ai agi différemment pour l'honneur de mon Nom » : Ez 20, 9.)
Avec ce premier verset, le psalmiste dit à Dieu : je ne te demande pas de montrer ta gloire ici pour nous. Non, nous n'avons aucun mérite pour cela (le peuple a vécu l'exil comme une punition pour ses infidélités). Montre plutôt ta gloire par fidélité à toi-même, par fidélité à ton Nom. Ne le fais pas pour nous : fais-le pour Toi. C'est l'une des plus belles expressions de la gratuité dans la foi. Le psalmiste savait que nous ne pouvons pas faire abstraction de nos besoins dans nos prières, mais nous pouvons prier Dieu de ne pas en tenir compte. C'est peut-être la plus grande gratuité possible sous le soleil : Dieu, je ne peux pas oublier mes intérêts, tu le sais, mais n'en tiens pas compte pendant que je prie. Ici, la foi se distingue du commerce, la prière de la magie. On prie Dieu pour Dieu. L’une des plus grandes avancées religieuse et humaine de l'Exil, c’est la gratuité de la prière, la capacité de l'homme à se transcender, à être plus grand que ses propres besoins.
Une dernière considération au sujet de l'idolâtrie. L'interdiction biblique de représenter Dieu par des statues ou des dessins, a eu pour effet de laisser place à une grande floraison d'images littéraires et narratives à son sujet. La Bible a interdit les images plastiques de Dieu, mais elle a produit, quantitativement et qualitativement, un nombre infini d'images intellectuelles le concernant : le midrash rabbinique, les légendes juives, sans oublier l'immense littérature qui s’inspirée des récits bibliques. Cet interdit a appauvri les arts visuels de la culture juive mais, comme la haie léopardienne, il a permis l’éclosion d’une littérature prodigieuse. Si Dieu n'a pas été peint, il a en revanche fait l’objet de nombreux récits et traités. La philosophie grecque pensait avant tout à l'homme, la sagesse biblique pensait avant tout à Dieu. Mais la Bible, n'a peut-être pas été suffisamment consciente du grand danger des représentations intellectuelles de Dieu (L.A. Schoekel). Elle a proscrit l'image de Dieu (et la prononciation de son Nom) pour le sauver dans son mystère et son intimité, pour le protéger de nos nombreuses manipulations.Toutefois les images les plus puissantes ne sont pas visuelles, mais mentales. L'idolâtrie ne se traduit pas seulement en figurines et en statues, les plus pernicieuses d’entre elles relèvent de notre intellect. La parole, qui anime en profondeur le cœur de la Bible, est beaucoup plus à même de produire des fétiches et de construire des veaux d'or que nos mains.
Les idolâtries de l’esprit portent un nom : ce sont les idéologies. Et parmi celles-ci les idéologies religieuses sont des plus néfastes, car elles oublient souvent l'interdiction de "se fabriquer des images" de Dieu. La tentation de la théologie est de violer l’interdiction de ce commandement. Alors que le bon scientifique ou le bon économiste sait que le modèle qu'il utilise pour décrire le monde n'est pas le monde (par exemple : la concurrence parfaite n'est pas le marché), le théologien (sauf les grands, et parmi eux Saint Thomas) est tenté de croire que les modèles qu'il a construits pour décrire Dieu en sont l'image. Et donc, une fois qu'ils ont construit un modèle conçu comme une image, ils réduisent Dieuà cette image et l’y enferment. Nous avons tué des milliers de personnes, brûlé des hérétiques parce que nous étions trop sûrs que l'idée que nous avions de Dieu était son image. Ce n'est qu'en retrouvant le sens de l’interdit biblique qui préserve le mystère de Dieu que nous pouvons apprendre l'art du dialogue avec ceux qui ont d'autres conceptions de Dieu.
Le dernier verset, qui dénonce les idoles, est très significatif : « Qu'ils deviennent comme elles, tous ceux qui les font, ceux qui mettent leur foi en elles! » (115, 8). Avec le temps, nous avons appris que le subjonctif ("qu’ils deviennent") peut être remplacé par l'indicatif : ils deviennent. Nous devenons les objets et les images que nous adorons. Nous ne nous en rendons pas compte, mais nous nous devenons toujours plus semblables aux produits que nous achetons, des citoyens qui se confondent de plus en plus avec le consommateur-idole. Le Psaume se termine par une splendide série de bénédictions. Elles nous sont destinées, n'en perdons aucune : « Que le Seigneur multiplie ses bienfaits pour vous et vos enfants ! Soyez bénis par le Seigneur qui a fait le ciel et la terre ! Le ciel, c'est le ciel du Seigneur ; aux hommes, il a donné la terre. » (115, 14-16).
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Par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 13/09/2020
La question de savoir comment j’en suis arrivé à aborder un sujet aussi archaïque n'a pas encore trouvé de réponse. Il y a eu l’influence de divers facteurs, liés aux années, à l'âge. La maturité, c'est tout. En tant qu'homme et en tant qu'artiste, j'ai dû me trouver, d'une manière ou d'une autre, dans un état de "réceptivité".
Thomas Mann, Joseph et ses frères (appendice)
Dans l'interdiction de se faire une image de Dieu, se cachent des questions de grande importance humaine et religieuse. Le Psaume 115 nous en révèle quelques-uns.
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Par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 06/09/2020
« Mais Dieu comprend. Les désespérés ont aussi le droit de prier. Et quand je prie, je dois parler au nom de toutes les créatures. Prions donc au nom des plus désespérés du monde. »
David Maria Turoldo, Les Psaumes
Les imprécations font également partie du Livre. Il est important de comprendre pourquoi, sans être choqué par la douleur et le désespoir des êtres humains.
La Bible n'est pas un recueil de bons sentiments, ni un répertoire d'histoires édifiantes pour les gens bien. Elle contient des gestes cruels et des mots terribles, échos des gestes et des mots de Caïn. Les ancêtres du peuple élu et les meilleurs de leurs rois se présentent avec des vertus et des vices, faisant preuve d’amour, mais aussi de péchés, de méchancetés et de crimes terribles. Au centre de la généalogie de Jésus se trouve Urie le Hittite, un nom qui chaque année, à la fête de Noël, nous rappelle que l’ Enfant de Bethléem est aussi le fruit d'une rencontre entre une fleur immaculée et la fleur du mal. Cette généalogie moralement imparfaite exprime le seul genre de perfection possible sous le soleil. Pour que le Logos puisse devenir vraiment homme, il n'y avait pas d'autre chemin pour lui que la route poussiéreuse que nous foulons depuis des millénaires, où près de Jéricho nous avons rencontré un Samaritain penché sur un homme à moitié mort, où près de Damas nous avons vu un persécuteur des chrétiens devenir leur bénédiction, et où, près d'Emmaüs, nous avons entendu un voyageur prononcer des paroles du terroir ayant un goût de ciel et de pain.
[fulltext] =>Tout cela, nous le savions, tout cela, nous le savons. Mais cette prise de conscience quelque peu abstraite de l'imperfection de la "perfection" biblique ne suffit pas pour nous épargner le choc de la rencontre avec le psaume 109. Nous savions que, dans les Psaumes, Dieu est du côté de l'homme, qu’ il connaît notre langage et emprunte tous nos mots pour nous parler de Lui-même. Nous le savions, mais nous n'étions pas encore préparés à recevoir ce psaume. C'est le texte qui contient les plus puissantes malédictions du Psautier et de toute la Bible. Beaucoup ont pensé, au cours des siècles, supprimer ces terribles versets 6-19, parce qu'ils étaient convaincus que la Bible ne devait pas contenir de tels propos injurieux parce qu'il n'est pas possible d'associer aux paroles de Dieu des paroles humaines si éloignées de la nature de YHWH. Et au lieu de cela, ces anciens scribes et maîtres ont sauvé les vingt malédictions du Psaume 109, elles étaient plus grandes que leur idée de Dieu, ils ont laissé cette parole libre de se mêler et de se fondre avec nos paroles, avec toutes nos paroles, qu’elles viennent de la lumière ou des ténèbres, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Ils nous ont donc fait un grand cadeau, ils nous ont révélé l'homme sous un meilleur jour, ils nous ont mieux expliqué Dieu.
« Ils me rendent le mal pour le bien, ils paient mon amitié de leur haine. « Chargeons un impie de l'attaquer : qu'un accusateur se tienne à sa droite. A son procès, qu'on le déclare impie, que sa prière soit comptée comme une faute. « Que les jours de sa vie soient écourtés, qu'un autre prenne sa charge. Que ses fils deviennent orphelins, que sa femme soit veuve.
« Qu'ils soient errants, vagabonds, ses fils, qu'ils mendient, expulsés de leurs ruines. Qu'un usurier saisisse tout son bien, que d'autres s'emparent du fruit de son travail. « Que nul ne lui reste fidèle, que nul n'ait pitié de ses orphelins. Que soit retranchée sa descendance, que son nom s'efface avec ses enfants. « Qu'on rappelle au Seigneur les fautes de ses pères, que les péchés de sa mère ne soient pas effacés. Que le Seigneur garde cela devant ses yeux, et retranche de la terre leur mémoire ! » Ainsi, celui qui m'accuse oublie d'être fidèle : il persécute un pauvre, un malheureux, un homme blessé à mort. Puisqu'il aime la malédiction, qu'elle entre en lui ; il refuse la bénédiction, qu'elle s'éloigne de lui ! Il a revêtu comme un manteau la malédiction, qu'elle entre en lui comme de l'eau, comme de l'huile dans ses os ! Qu'elle soit l'étoffe qui l'habille, la ceinture qui ne le quitte plus ! » (109, 5-19). C’est à vous couper le souffle…
Nombreuses on été les stratégies visant à sauver Dieu et la Bible de ces malédictions. Beaucoup pensent qu'un tel psaume devrait simplement être exclu du psautier, car la Bible ne doit nous offrir que des propos bienveillants pour améliorer nos relations sociales. D'autres exégètes ont essayé d'atténuer les choses en proposant de lire cette série d'adjectifs comme une longue citation que l'accusé (le psalmiste) fait des paroles de ses accusateurs ; une tentative qui s'avère inefficace, car le psalmiste lui-même, au verset n°20, invoque explicitement la loi de la riposte pour ses accusateurs : « C'est ainsi que le Seigneur paiera mes accusateurs, ceux qui profèrent le mal contre moi. » Guido Ceronetti, qui nous a donné la plus belle traduction de ce psaume en italien, commente ces versets : « Nous sommes tellement incroyants ! Si faibles face à ce qui est horrible, satanique ! Celui qui sait maudire sait combattre. » (Le Livre des Psaumes)
Je propose ici une autre approche. Nous devons nous réjouir, tout simplement, de la confusion et du malaise que nous éprouvons en présence de cette prière inhabituelle. Laissez-leur une place, même lorsqu’ils durent longtemps, et pour certains, toujours. Jusqu'à ce qu’un jour, vous vous retrouviez avec un fils assassiné, avec une petite-fille, la lumière de vos yeux, violée, avec un frère trompé et ruiné à jamais, jusqu'à ce que vous rencontriez une vraie victime et un vrai bourreau dans votre chair. Jusqu'à ce que vienne le moment de désespérer d'une douleur causée à un innocent, peut-être à un innocent que vous aimiez beaucoup - les victimes dont les autres autres parlent et celles qu’on connaît dans sa propre chair sont très différentes. Lorsque cet innocent, c'est vous, un ami cher, votre femme, votre père... Ce jour-là et à ce moment-là, si vous en connaissez l’existence, mais que vous ne l'avez pas compris au temps où tout était facile, vous vous souvenez que dans la Bible, conservé dans le coffret du psautier, il y a un psaume particulier. Vous avez un désir fou de le retrouver. Et donc vous prenez cette Bible laissée sur l’étagère pendant des mois, voire des années, vous secouez la poussière, vous essayez de vous rappeler où se trouvent les psaumes : ils font suite au Livre de Job, et vous comprenez enfin pourquoi. Les pages du psautier défilent, les psaumes de joie, de louange, d'action de grâce et sur la grandeur de Dieu ne manquent pas... mais ils ne vous disent rien, ils vous dérangent. Ce malaise une fois surmonté, vous continuez à chercher autre chose, et finalement vous tombez sur le Psaume 109. Dès les premières lignes vous avez l'impression qu'il a été écrit juste pour vous, juste pour ce jour terrible. Il vous attendait, et vous ne le saviez pas. Vous commencez la lecture de cette horrible série de malédictions : des mots qui vous expriment complètement. Chacun d’eux vous arrache des larmes. Vous sentez que quelque chose commence à bouger en vous, que votre cœur endurci et gelé par la colère et la douleur se réchauffe, que le nœud qui avait jusqu'ici coincé la respiration de vos poumons et le souffle de votre âme commence à se défaire. Vous comprenez que vous avez peut-être récité les Psaumes toute votre vie pour qu’au moment le plus tragique, vous puissiez vous souvenir de cette seule prière composée des seuls mots qui puissent vous convenir. La Bible peut faire cela aussi. Son Dieu nous comprend.
Si ces anciens scribes qui voulaient effacer le psaume 109 avaient gagné, vous n'auriez pas eu ces seuls mots pour recommencer à vivre, pour apprendre de nouveau à prier. Prier, oui, parce que si cette lecture est sincère, en lisant ces malédictions, vous comprenez que ces mots que vous sentez vôtres et vrais ne peuvent pas être les derniers: ce ne sont que les avant-derniers. Mais pour comprendre qu'ils étaient avant-derniers, il fallait les ressentir comme derniers et vrais. Ainsi, la prière peut se terminer par les derniers mots du psaume : « Ils maudissent, toi, tu bénis ! » (109, 28). Et c’est alors que vous revenez au Golgotha, que vous voyez enfin un fils crucifié, et que vous pouvez peut-être répéter « Père, pardonne-leur parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils font ». Mais avant la rencontre avec le Psaume 109, vous n'auriez peut-être pas pu prononcer ces paroles. Il y a une fraternité entre les paroles de la Bible. On ne comprends certains de ses mots que lorsqu’on découvre qu'ils étaient là pour nous permettre d’en dire d'autres. Pour pouvoir demander à Dieu que les malédictions que nous avons nous-même prononcées deviennent des bénédictions, nous avons d'abord dû traverser l'enfer du désespoir en compagnie de la Bible et de Dieu. Sans le Psaume 109, la Bible aurait perdu des mots qui rejoignent les régions les plus périphériques et les plus précieuses de l'humanité. Des coins où se cachent les mots muets, les prières étouffées, qui seraient restés enfouies sans le courage de ces anciens qui ont compris qu'il n'y a pas de mots humains que Dieu ne puisse atteindre. Immense, extraordinaire la Bible !
Dans la Bible, le premier "père miséricordieux", c’est la Bible elle-même, Nouveau et Ancien Testament confondus. Il voit son fils revenir de loin, l'embrasse alors qu'il ne sait toujours pas et ne réussit pas à parler, lui jette les bras autour du cou et lui passe la bague au doigt, sous les critiques de nombreux frères aînés qui voudraient que l'agapè s'arrête à la porte de la porcherie et des maisons closes. L'étreinte miséricordieuse de la Bible réside dans ses paroles, qui nous voient, nous regardent, nous accompagnent dans notre marche entre le ciel et l'enfer, et nous relèvent en nous épaulant dans nos malheurs. En nous accompagnant jusque dans les bas-fonds: le Psaume 109 est cette terre au fond des eaux profondes dans lesquelles nous sommes tombés, sur laquelle nous retrouvons pied et qui nous permet de remonter.
Nous ne comprenons pas la Bible, tout comme nous ne comprenons pas la grande littérature. Nous pensons que les paroles de résurrection sont celles qui adviennent après les péchés, après les trahisons, après les méchancetés, après les malédictions. Nous lisons ces grands textes à la recherche des paroles de Job à qui l'on rend ses fils et ses biens, de la victoire de David sur Saül, de la fin de l'exil babylonien, du tombeau vide. Ainsi, nous manquons toutes les autres résurrections cachées sur le tas de fumier, dans la défaite de Saül, au début de l'exil, dans le cri du Golgotha. Parce que la Bible sauve et rachète les victimes dans l’état où elle les voit, au moment où elle se penche sur elles, où elle les accompagne dans leurs drames. Victor Hugo rachète Jean Valjean alors qu'il l'atteint dans son malheur, Israël Joshua Singer sauve la femme de Reb Abraham Hirsch Ashkenazi tandis qu'il décrit sa misérable vie : "Et les ayant regardés, il les aima", peut-être que le souffle divin de la grande littérature est tout entier dans ces regards capables de résurrection.
Nous, en revanche, nous sommes à la recherche d’une "happy end", nous n'aimons pas les samedis saints, nous sautons du vendredi au dimanche. Nous nous débarrassons de ces mots bibliques : malédiction, désespoir… et nous perdons le contact avec tous les hommes et les femmes qui en ce moment les vivent dans leur chair. Notre prière se rétrécit, devient minuscule, incapable de toucher l'âme du monde et le cœur de Dieu.
Le Psaume 109 (verset 8) est également entré dans le Nouveau Testament. Les Actes des Apôtres l'utilisent pour parler de la mort de Judas : « Car il est écrit au livre des Psaumes : "Que son domaine devienne un désert, et que personne n’y habite, et encore : Qu’un autre prenne sa charge." » (1,20). Pierre a également trouvé dans ce Psaume 109 des mots pour dire une douleur scandaleuse et muette - nous ne devons pas oublier que Judas était un ami des apôtres et de Jésus : « Ce Judas était l’un de nous et avait reçu sa part de notre ministère. » (Actes 1, 17). Nous pouvons penser et espérer que même Judas n'a pas été exclu de l'étreinte miséricordieuse de la Bible et de son Dieu.
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L'âme et la cithare /23 - Le Psaume 109 est la terre pour remonter du fond des eaux où nous sommes tombés.
Par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 06/09/2020
« Mais Dieu comprend. Les désespérés ont aussi le droit de prier. Et quand je prie, je dois parler au nom de toutes les créatures. Prions donc au nom des plus désespérés du monde. »
David Maria Turoldo, Les Psaumes
Les imprécations font également partie du Livre. Il est important de comprendre pourquoi, sans être choqué par la douleur et le désespoir des êtres humains.
La Bible n'est pas un recueil de bons sentiments, ni un répertoire d'histoires édifiantes pour les gens bien. Elle contient des gestes cruels et des mots terribles, échos des gestes et des mots de Caïn. Les ancêtres du peuple élu et les meilleurs de leurs rois se présentent avec des vertus et des vices, faisant preuve d’amour, mais aussi de péchés, de méchancetés et de crimes terribles. Au centre de la généalogie de Jésus se trouve Urie le Hittite, un nom qui chaque année, à la fête de Noël, nous rappelle que l’ Enfant de Bethléem est aussi le fruit d'une rencontre entre une fleur immaculée et la fleur du mal. Cette généalogie moralement imparfaite exprime le seul genre de perfection possible sous le soleil. Pour que le Logos puisse devenir vraiment homme, il n'y avait pas d'autre chemin pour lui que la route poussiéreuse que nous foulons depuis des millénaires, où près de Jéricho nous avons rencontré un Samaritain penché sur un homme à moitié mort, où près de Damas nous avons vu un persécuteur des chrétiens devenir leur bénédiction, et où, près d'Emmaüs, nous avons entendu un voyageur prononcer des paroles du terroir ayant un goût de ciel et de pain.
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par Luigino Bruni
Publié su Avvenire le 30/08/2020
« Les prêtres ne peuvent pas accepter de cadeaux », déclara Don Paolo. La femme protesta : « Alors, ça ne compte pas », dit-elle. « Si vous n'acceptez pas la poule, la grâce ne compte pas, et l'enfant naîtra aveugle ». « La grâce est libre », dit Don Paolo. « Les grâces gratuites n'existent pas » répondit la femme
Ignazio Silone, Vin et pain
La Bible nous enseigne à rendre grâce, pour le salut que nous recevons à titre entièrement gratuit et non pas en raison de nos mérites.
La gratitude est un mot essentiel. Il est surtout employé en famille, dans les communautés, moins dans les entreprises modernes, où la gratitude, ainsi que les termes reconnaissance et remerciement, qui lui sont proches, ne trouve pas la place qu'elle mérite à cause de sa fragilité. La gratitude - de gratia, charis - est très liée au mot "merci", que nous apprenons de nos parents dès la petite enfance et qui par la suite imprègne nos relations. Même ces "mercis" que nous disons, plusieurs fois par jour, par respect des normes sociales, portent une certaine trace de gratitude, qui se manifeste cependant plus pleinement à travers d'autres "mercis" : ceux-ci sont attendus et souhaités, mais sans prétention aucune. Ils sont décisifs dans les relations les plus importantes : ce sont des attentions délicates, plus féminines que masculines, plus murmurées que dites, qui arrivent lors des étapes importantes de la vie. Par exemple les remerciements de ce collègue le dernier jour de travail, égaux et différents de tous les autres, écrits sur un billet qui accompagne le cadeau d'adieu. Celui de l'élève le plus difficile, qui le dernier jour d'école, laisse un post-it sur le bureau : "Merci, professeur" ; ou celui qui nous est resté dans la gorge et que nous n'avons pas pu dire à nos parents en quittant la maison pour suivre un appel, et que bien des années après nous avons trouvé semblable à ces mercis ineffables qui sont murmurés tous les jours au chevet des malades.
[fulltext] =>La beauté et le drame de la gratitude résultent de sa gratuité. N'étant pas un contrat, la gratitude n'a de valeur que si elle est gratuite (gratitude et gratuité, deux mots presque identiques). Mais elle comporte également une dimension de devoir et d'obligation. Car si d'une part les qualités les plus précieuses de la gratitude sont la liberté et le don, d'autre part il y a des remerciements qui, lorsqu'ils font défaut, engendrent l'ingratitude, l’un des sentiments les plus forts et les plus douloureux. La gratitude induit en fait une forme de réciprocité (re-mercier, re-connaissance), et implique donc aussi une sorte de restitution. La présence de l'ingratitude à côté de la gratitude fait de la reconnaissance une expérience complexe. Parce qu'avec la gratitude nous sommes au centre de la sémantique paradoxale du don et de la réciprocité, donc de ces émotions et actions où s’entremêlent attentes et exigences, liberté et obligation, liberté et devoir. Nous ne pouvons pas prétendre de notre voisine qu'elle nous invite avant son déménagement et nous remercie d’avoir arrosé en son absence ses plantes durant de nombreux étés, mais si elle ne le fait pas, nous ne sommes pas heureux : cette ingratitude brise quelque chose d'important dans la relation. Quant à l'adjectif "ingrat", il nous blesse sans doute plus que tout autre s'il est prononcé par des personnes qui nous sont chères.
À dire vrai, nous ne reconnaissons les personnes qu'à la fin d'une relation, lorsque se manifeste leur capacité de gratitude - qui se prolonge parfois même au-delà de la vie : je suis toujours frappé de voir la fidélité reconnaissante de beaucoup et surtout de nombreuses femmes qui, pendant des années, des décennies, prennent soin de la tombe de leurs proches. Nous souffrons beaucoup de l'ingratitude, parce que nous avons tendance à surestimer la gratitude nous est due (et à sous-estimer celle que nous devons), car nous avons constamment le sentiment de ne pas être assez remerciés. Par ailleurs la gratitude a besoin de la durée. Elle ne naît que dans le cadre de relations stables et suivies. Elle se manifeste aujourd'hui mais elle a mûri hier, c'est donc un exercice de mémoire : le souvenir de ce que tu as été pour moi fait naître maintenant de la gratitude dans mon cœur. C'est pourquoi, dans l'Antiquité classique, l'icône qui représentait la gratitude était la cigogne, car elle avait la réputation légendaire de veiller sur ses parents devenus âgés.
La Bible nous enseigne à cultiver et à exprimer notre gratitude également envers Dieu : « Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour ! » (Psaume 107, 1). La communauté des croyants est aussi une communauté qui remercie, car elle est une communauté de personnes sauvées. Le Psaume 107 est en fait un chant d'action de grâce (il y en a beaucoup dans le Psautier) qui naît de l'expérience du salut. Ce Psaume en donne quatre exemples : la faim et la soif (« Certains erraient dans le désert sur des chemins perdus… ils souffraient la faim et la soif, ils sentaient leur âme défaillir » : 107,4-5), la prison (« Certains gisaient dans les ténèbres mortelles, captifs de la misère et des fers… car il brise les portes de bronze, il casse les barres de fer ! : 10-16), les maladies mortelles (« ils avaient toute nourriture en dégoût, ils touchaient aux portes de la mort. R/1Dans leur angoisse, ils ont crié vers le Seigneur, et lui les a tirés de la détresse » : 18-19), les dangers de la mer : « Certains, embarqués sur des navires, occupés à leur travail en haute mer… il réduisit la tempête au silence, faisant taire les vagues. » (23-29). Et après chaque scène le refrain de l'action de grâce est répété quatre fois : « R/ Qu'ils rendent grâce au Seigneur de son amour, de ses merveilles pour les hommes » (15). C'est de l'expérience concrète du salut que jaillit l'action de grâce. Ici la délivrance est tangible et porte sur des souffrances physiques : elle rappelle l’action du Jésus historique, qui, tout en annonçant un salut spirituel, libérait les gens de leurs maladies, les rassasiait et les guérissait. Le salut qui produit la gratitude est toujours précis, c'est toujours une résurrection concrète.
Le salut, qui occupe une place centrale dans la Bible et ensuite dans le christianisme, a beaucoup à voir avec la dynamique paradoxale de la gratitude. D'une part il est entièrement donné par Dieu et n’entre pas dans le registre de la conditionnalité, do-ut-des (= je donne pour que tu donnes) : nous sommes sauvés, un point c’est tout ! Le salut ne se gagne pas par nos vertus, ni par nos mérites - peut-être par notre cri : « R/1Dans leur angoisse, ils ont crié vers le Seigneur, et lui les a tirés de la détresse » (107, 13). Le salut répond à un cri, mais non pas à une action qui le justifie : le cri est une expression de la foi, et la justification de ce salut est la foi (nous voyons ici, entre autres, combien la théologie de Saint Paul était ancrée dans l'Ancien Testament). Mais il est très beau et consolant de voir que dans tout ce Psaume, les hommes sauvés ne sont pas le peuple d'Israël, ni les élus : ce sont tout simplement des hommes. Ce salut est universel : il suffit de crier - et peut-être le faisons-nous trop peu. En même temps la Bible invite l’homme sauvé à la gratitude, à remercier Dieu pour le salut. C'est là qu’apparaît une autre grande dimension de la prière : on ne prie pas seulement pour obtenir le salut (dans la bible le cri est une étrange forme de prière), mais on doit surtout prier pour rendre grâce. Jésus lui-même est sensible à la gratitude et à l'ingratitude. Souvent, les gens ont appris à prier en disant merci : ils n'avaient rien demandé, ils ont fait l'expérience du salut et ont rendu grâce. Et de cette action de grâce est née la prière. La plus belle naissance, entièrement gratuite, libérée de tous les résidus d’une foi mercantile.
Il est difficile de rester dans la gratitude, dans la condition de ceux qui rendent grâce, conscients que tout ce qu'ils possèdent est un don, que le salut qu'ils vivent chaque jour est gratuit. C'est difficile, surtout pour le croyant. Parce que, une fois que nous avons fait l'expérience du salut et appris la gratitude, il y a chez les hommes (moins chez les femmes) un besoin progressif et naturel de vouloir mériter le salut à venir, de sentir que dans le salut qui nous est donné chaque matin il y a aussi quelque chose qui nous est propre, à laquelle nous avons aussi contribué, qu'il y a une part de cofinancement dans ce prêt qui nous est offert et dont la valeur est infinie, que cette miséricorde, cet amour fidèle (hesed), nous les avons quelque peu mérités. Ainsi, l'expérience d'être sauvés se transforme, peu à peu, et sans que nous nous en rendions compte, en celle de "se sauver soi-même". Et chaque fois que le fait de se sauver vole du terrain à celui d'être sauvé, la valeur de la gratitude est inévitablement réduite.
C'est humain, c'est très humain. Parce que nous, les hommes, nous n'aimons pas dépendre entièrement de la gratuité d’autrui, nous aimons conquérir notre salut à la sueur de notre front et avec nos mérites, nous aimons trop cette réciprocité où recevoir et donner s’alternent. Par ailleurs nous avons vu à quel point l'absence de réciprocité a produit des injustices, des inégalités, a maintenu des pauvres dans un état de sujétion perpétuelle parce qu'entièrement dépendants de leurs maîtres. L'idée d'un Dieu qui nous donne tout et dont nous dépendons totalement a également fait naître une théologie politique et économique qui n'a certainement pas aidé les pauvres à se libérer de leur condition d'infériorité : en prônant une pseudo- gratitude, à sens unique et obligatoire, elle a laissé en Europe et dans le monde une souffrance infinie. Des peuples ont également payé le prix fort de ces théologies qui avaient utilisé une certaine idée de Dieu pour légitimer, en les sacralisant, des structures de pouvoir injustes. D'où le remarquable mouvement social, économique et politique qui, au cours des derniers siècles, a voulu lier les droits à la nature ou à un pacte social fondé sur l’égalité première, et a fait dépendre le salaire du travail.
Et pendant que ce grand mouvement éthique des peuples se déroulait, et continue de se dérouler, la Bible se tient là, fidèle à elle-même, pour nous rappeler que ces logiques, essentielles et bienfaisantes pour les relations entre les hommes, ne doivent pas être appliquées à Dieu, qui doit être maintenu au-dessus de nos mérites. Car si notre vie n’est pas fondée sur un principe de gratuité absolue qui nous rappelle qu'avant et après les mérites il y a un don infini, toute méritocratie engendre la dictature du fort sur le faible. Le Dieu biblique ne nous aime pas parce que nous le méritons - ou parce que nous le méritons plus que d'autres - mais parce que nous sommes, tout simplement, ses fils et ses filles, et la filiation n'est pas une relation méritocratique, malgré les protestations du fils aîné de la parabole. Nous devons rendre grâce, c'est notre devoir, mais le fait de dire merci aujourd'hui n'est pas la condition préalable pour être sauvé demain : Dieu nous sauverait encore même si nous étions ingrats. Connaître et se souvenir de cette gratuité absolue de Dieu signifie donc que quelque part dans notre être, fait à Son image, nous sommes plus grands que la réciprocité, et que nous aussi, au moins une fois, nous pouvons aimer ceux qui ne le méritent pas, nous pouvons aimer une personne ingrate.
La cigogne est aussi celle qui apporte les bébés. Les civilisations de la cigogne sont celles qui ont su concilier la gratitude envers les personnes âgées et l'amour des enfants. Cela est manifeste dans le quatrième commandement, qui associe « ton père et ta mère honoreras » à la promesse « d’une longue vie sur terre ». Seuls les enfants savent prolonger notre vie.
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par Luigino Bruni
Publié su Avvenire le 30/08/2020
« Les prêtres ne peuvent pas accepter de cadeaux », déclara Don Paolo. La femme protesta : « Alors, ça ne compte pas », dit-elle. « Si vous n'acceptez pas la poule, la grâce ne compte pas, et l'enfant naîtra aveugle ». « La grâce est libre », dit Don Paolo. « Les grâces gratuites n'existent pas » répondit la femme
Ignazio Silone, Vin et pain
La Bible nous enseigne à rendre grâce, pour le salut que nous recevons à titre entièrement gratuit et non pas en raison de nos mérites.
La gratitude est un mot essentiel. Il est surtout employé en famille, dans les communautés, moins dans les entreprises modernes, où la gratitude, ainsi que les termes reconnaissance et remerciement, qui lui sont proches, ne trouve pas la place qu'elle mérite à cause de sa fragilité. La gratitude - de gratia, charis - est très liée au mot "merci", que nous apprenons de nos parents dès la petite enfance et qui par la suite imprègne nos relations. Même ces "mercis" que nous disons, plusieurs fois par jour, par respect des normes sociales, portent une certaine trace de gratitude, qui se manifeste cependant plus pleinement à travers d'autres "mercis" : ceux-ci sont attendus et souhaités, mais sans prétention aucune. Ils sont décisifs dans les relations les plus importantes : ce sont des attentions délicates, plus féminines que masculines, plus murmurées que dites, qui arrivent lors des étapes importantes de la vie. Par exemple les remerciements de ce collègue le dernier jour de travail, égaux et différents de tous les autres, écrits sur un billet qui accompagne le cadeau d'adieu. Celui de l'élève le plus difficile, qui le dernier jour d'école, laisse un post-it sur le bureau : "Merci, professeur" ; ou celui qui nous est resté dans la gorge et que nous n'avons pas pu dire à nos parents en quittant la maison pour suivre un appel, et que bien des années après nous avons trouvé semblable à ces mercis ineffables qui sont murmurés tous les jours au chevet des malades.
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 23/08/2020
« Le Livre des Psaumes surpasse tous les autres car il résume leur contenu et grâce au chant, il ajoute ce qu'il a de propre et d'inédit. D'autres livres contiennent la Loi, annoncent le Messie ; celui-ci décrit les mouvements de l'âme. »
Anastase, Épître à Marcellin (4e siècle après J.C.)
La confiance et la foi sont deux mots qui se rejoignent. Sans l'une, l'autre n’existe pas, et la foi est une relation sous le signe de la fragilité. Le Psaume 91 nous parle de la nature de la foi dans son lien avec la confiance.
La confiance est une relation vulnérable par nature. Lorsqu'une personne fait confiance à une autre, elle met entre ses mains quelque chose dont celle-ci peut disposer et même abuser. La racine de la joie particulière que nous ressentons lorsque quelqu'un nous fait confiance, réside dans le pari de celui qui nous l’accorde : nous sentons qu'il fait de nous le dépositaire de quelque chose de précieux en lien avec sa personne, son intimité, son mystère, même lorsqu’il s’agit de simples choses matérielles. Cette condition de vulnérabilité augmente avec la valeur du « bien » qui est déposé dans les mains de l'autre, dans la "paume de sa main". Une vulnérabilité qui a aussi sa propre valeur, possède des propriétés typiques qui changent et améliorent généralement la nature d'une relation. Montrer à l'autre ma vulnérabilité, la rendre intentionnellement manifeste à ses yeux, me rend plus fragile mais aussi plus fort, grâce à la force transformatrice de la confiance vulnérable. La première et la plus importante preuve que celui à qui l'on a fait confiance l’honore réside dans le fait de se sentir honoré du fait même de cet acte de confiance - trop de dettes ne sont pas honorées parce que notre argent, au lieu d'honorer notre débiteur, l’humilie..
[fulltext] =>Celui qui réalise un contrat de confiance en faisant tout son possible pour réduire et éventuellement annuler les risques d'abus et de trahison inhérents à la confiance, finit par réduire à zéro la valeur de ce bien relationnel. Si, par exemple, en rédigeant un contrat, j'en définis les détails pour y inclure toutes les situations futures possibles afin de me protéger de tout abus de cette relation de confiance, je donne à l'autre partie un message de méfiance qui change la nature de la relation que nous construisons. De nombreuses relations sont tuées dans l'œuf parce que le désir de prévenir de futurs abus crée un climat de méfiance qui empêche la relation de démarrer. La confiance invulnérable n'est pas une bonne chose. Nous le voyons entre époux, entre frères et sœurs, entre collègues, entre amis, soit autant de personnes que nous aimons et de qui nous sommes aimés tant que nous pouvons leur faire confiance (et réciproquement), sans que pour autant la réciprocité soit parfaitement garantie, même s’il y va de notre bonheur. Dans de nombreuses relations, la confiance est mutuelle, c'est une rencontre de biens relationnels, pas nécessairement symétrique. Dans certaines étapes décisives de notre vie, la relation de confiance implique une troisième personne :en plus e celui qui fait confiance et de celui celui qui bénéficie de cette confiance, il y a un tiers qui s’en porte garant ou témoin.
C'est surtout la dimension triangulaire ou trinitaire de la foi et de la confiance qui nous frappe dans le célèbre Psaume 91, une prière chère à de nombreuses traditions religieuses : « Quand je me tiens sous l'abri du Très-Haut et repose à l'ombre du Puissant, je dis au Seigneur : "Mon refuge, mon rempart, mon Dieu, dont je suis sûr ! " (Psaume 91, 1-2). Ce dialogue à trois entre le protagoniste du Psaume (qui passait peut-être la nuit dans un temple en attendant un oracle en songe), son Dieu et un troisième personnage qui lui enseigne la confiance et la foi est très beau. La foi biblique est essentiellement bâtie autour de trois pôles. Entre le croyant et son Dieu, il y a quelqu'un qui lui dit qu'il peut avoir confiance. Ce quelqu'un est un prophète, c’est Abraham ou Moïse, c’est la Torah, mais ce peut être aussi un frère ou une sœur dans la foi. Le psaume 91 ne nous dit pas qui est cette troisième personne qui enseigne la foi à la personne qui prie, et cet anonymat est très significatif car ce "quelqu'un" peut être n'importe qui, ce peut être moi, ce peut être toi. Nous n'avons pas tous un prophète à nos côtés pour nous enseigner la foi, mais nous avons tous une personne qui peut nous apprendre à croire et à avoir confiance. Une personne qui nous dit : « C'est lui qui te sauve des filets du chasseur et de la peste maléfique ; il te couvre et te protège. Tu trouves sous son aile un refuge : sa fidélité est une armure, un bouclier.Tu ne craindras ni les terreurs de la nuit, ni la flèche qui vole au grand jour, ni la peste qui rôde dans le noir, ni le fléau qui frappe à midi. » (91, 3-6). Et nous répondons: « Oui, mon refuge c’est Toi, Ô Seigneur ! » (91, 9) : c'est le deuxième mouvement de la foi, lorsqu'après avoir cru celui qui lui a enseigné à avoir foi et confiance, le croyant fait sa profession de foi. Ce mouvement est le deuxième, parce qu'il y a d'abord quelqu'un qui propose la foi - la foi finira sur terre quand le dernier croyant cessera de l’offrir à quelqu'un.
C'est en cela aussi que réside le sens et la valeur de la Tradition : c'est la chaîne des personnes par qui la foi s’est transmise, cette corde de solidarité déployée au fil des siècles, composée de personnes et de communautés qui ont appris à croire en Dieu grâce à la parole d’autres hommes, un dialogue continu entre ceux qui nous disent de faire confiance et nous qui répondons par notre oui, pour dire ensuite à d’autres de faire confiance à nos paroles parce qu’elles ne viennent pas de nous. La foi biblique consiste à croire en Dieu en croyant ceux qui nous parlent en montrant leur visage. C'est toujours une expérience communautaire, un événement qui se produit au milieu des gens, c'est une relation de confiance. Parfois, nous ne sommes pas capables de croire parce que nous ne sommes pas en mesure de faire confiance, aussi la formation à la confiance entre les hommes est –elle une excellente préparation à la foi. Celui qui ne fait confiance à personne ne croit même pas en Dieu, celui qui fait peu confiance aux hommes ne fait guère confiance à Dieu : la foi devient alors un acte purement cognitif qui ne change pas la vie.
Enfin arrive le troisième mouvement. Dieu entre en scène : « Tu marcheras sur la vipère et le scorpion, tu écraseras le lion et le Dragon. Puisqu'il s'attache à moi, je le délivre ; je le défends, car il connaît mon nom. Il m'appelle, et moi, je lui réponds ; je suis avec lui dans son épreuve. Je veux le libérer, le glorifier ; de longs jours, je veux le rassasier, et je ferai qu'il voie mon salut. » (91,13-16). En formulant sa promesse, Dieu s'expose à la possibilité que ces paroles ne se réalisent pas, car l'histoire est un spectacle continu de personnes fidèles et justes qui prient sans obtenir de réponse, qui ne sont pas délivrées, qui connaissent l'échec. Et cela parce que la foi biblique participe de cette vulnérabilité inscrite dans toute relation de confiance véritable : celle-ci est vraie précisément parce que fragile. Car nous n'avons aucune connaissance directe de celui en qui nous avons confiance, nous ne le connaissons que "par ouï-dire" (Job), parce que nous en avons "entendu parler" par ceux en qui nous avons confiance. Parce que nous, tout comme Dieu, nous changeons constamment, chaque matin nous devons croire à nouveau en ce que nous avons cru jusqu'à la nuit précédente - la foi est un acte de confiance conjugué au présent. Un pas décisif vers une foi adulte se produit le jour où nous prenons conscience que lorsque nous prononçons le mot "Dieu", le mot le plus beau, le plus familier et le plus intime, nous ne savons pas ce que nous sommes en train de dire - mais nous continuons à le dire, car ces mots ne peuvent être qu'aimés. Voilà pourquoi, au début de certaines grandes vocations bibliques, il y a une mise en cnfiance compliquée : Moïse ne veut pas retourner en Égypte, Jérémie est récalcitrant, Jonas s'enfuit, Samuel a besoin de quatre appels pour dire "me voici", Élie pour se lever et poursuivre son chemin a dû apprendre à écouter le silence et YHWH a dû apprendre à chuchoter.
Si s’engager dans la foi n'était pas une entreprise risquée et fragile, ce ne serait pas une expérience authentiquement humaine, et en devenant croyants, nous deviendrions moins humains. Et quiconque, dans la vie, a rencontré une voix qui l'a appelé et lui a répondu, sait que ce risque est réel et effectif, car il sait que parfois même les vocations authentiques s’affadissent, se perdent dans l’ immense douleur (la leur et celle de Dieu). Nous ignorons pourquoi même d’authentiques vocations finissent mal. L'échec fait partie de la condition humaine, et une vocation infaillible serait tout simplement inhumaine. Et c'est la possibilité que la foi et la confiance placées dans un mystère puissent mal tourner qui en fait une expérience très humaine, semblable en dignité à la maternité, à la naissance et à la mort. Notre foi est une expérience entièrement humaine en raison de sa dimension tragique. On peut être pleinement humain sans accorder de l’importance à la foi ni aux croyants, mais on ne peut pas croire sans avoir en estime l'humanité, toute l'humanité, sans rien écarter du voyage qui va de l'enfer au ciel et inversement.
Ce Psaume a été repris par Satan, dans l'épisode des tentations du Christ : « Alors le diable l’emmène à la Ville sainte, le place au sommet du Temple et lui dit : " Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre " » (Mt 4,5-6). Satan cite ici le verset 12 du Psaume 91. Et Jésus répond à Satan en réaffirmant le rôle essentiel de la confiance dans la foi biblique : « Il est encore écrit : "Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu" » (Mt 4,7). Ce splendide verset qui finit dans la bouche de Satan nous livre un message important sur l’usage détourné des textes de l’Écriture. Le diable lui aussi connaît bien la Bible et cite des passages connus et utilisés par les évangélistes, autrement dit connaître et citer la Bible n'offre aucune garantie de vie ni d'authenticité doctrinale. Il y a un usage diabolique des écritures, y compris des psaumes et de la prière, au point que Satan choisit l'une des plus sublimes et des plus nobles prières du Psautier pour tenter Jésus. L'utilisation que Jésus fait des Écritures et celle qu’en fait Satan coexistent en nous – soyons-en au moins conscients !
C'est aussi en cela que réside le caractère vulnérable de la Bible : ses paroles sont exposées sur la place publique du monde, et chacun peut les utiliser pour prier, pour mieux aimer, pour apprendre à vivre ; mais tous nous pouvons aussi les utiliser pour maudire, pour condamner, pour tenter, pour manipuler les hommes et Dieu, pour blasphémer. Dieu nous fait également confiance, il place ses paroles dans nos cœurs, et nous pouvons les trahir. En enfer, il n'y a pas que « Pape satan, Pape satan, aleppe ! », il peut aussi y avoir des paroles bibliques manipulées et violées. Dieu, en choisissant de nous parler avec des mots humains, a choisi de partager notre fragilité. En cela aussi, il nous ressemble. C'est le quatrième mouvement de la foi.
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La confiance et la foi sont deux mots qui se rejoignent. Sans l'une, l'autre n’existe pas, et la foi est une relation sous le signe de la fragilité. Le Psaume 91 nous parle de la nature de la foi dans son lien avec la confiance.
La confiance est une relation vulnérable par nature. Lorsqu'une personne fait confiance à une autre, elle met entre ses mains quelque chose dont celle-ci peut disposer et même abuser. La racine de la joie particulière que nous ressentons lorsque quelqu'un nous fait confiance, réside dans le pari de celui qui nous l’accorde : nous sentons qu'il fait de nous le dépositaire de quelque chose de précieux en lien avec sa personne, son intimité, son mystère, même lorsqu’il s’agit de simples choses matérielles. Cette condition de vulnérabilité augmente avec la valeur du « bien » qui est déposé dans les mains de l'autre, dans la "paume de sa main". Une vulnérabilité qui a aussi sa propre valeur, possède des propriétés typiques qui changent et améliorent généralement la nature d'une relation. Montrer à l'autre ma vulnérabilité, la rendre intentionnellement manifeste à ses yeux, me rend plus fragile mais aussi plus fort, grâce à la force transformatrice de la confiance vulnérable. La première et la plus importante preuve que celui à qui l'on a fait confiance l’honore réside dans le fait de se sentir honoré du fait même de cet acte de confiance - trop de dettes ne sont pas honorées parce que notre argent, au lieu d'honorer notre débiteur, l’humilie..
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 9/08/2020
« Au temps où Dieu fit toutes choses, il créa le soleil. Le soleil naît, meurt et revient. Et il créa la lune. La lune naît, meurt et revient... Il créa aussi L'homme. L'homme naît, meurt et ne revient plus. »
Chant soudanais des Denka
Le Psaume 90 nous rappelle que nous pouvons surmonter la fugacité de l'existence en accordant notre cœur avec celui de l'univers. Et ensuite continuer chaque matin notre travail.
À l'origine de la vie spirituelle, il y a l'expérience de l'absolu. Une expérience rare qui peut se produire à tout âge : nous réalisons que nous ne sommes qu'un grain de sable dans l’infini de l’océan, que cet océan a un sens, tout comme nous-même, et que ce sens est le même. Si l’expérience philosophique commence par l’étonnement d’être-au-monde, la vie spirituelle commence par ce prodigieux sens unique à double sens : nous prenons conscience d’être un papillon éphémère, d’être nés pour voler un jour, mais l’ivresse de ce "vol fou" est la même que celle de l'univers. La photographie qui fixe un seul instant peut être aussi belle que le plus beau film, et même plus lumineuse. Notre temps est un moment, mais il a la même qualité que celui de Dieu. Tout comme l'absolu est entré dans notre temps, nous sommes entrés dans le sien, et nous participons du même temps. Lorsque nous parvenons à accorder notre cœur avec celui de l'univers, nous ressentons le même battement, nous découvrons que tous deux palpitent à l'unisson – et la prière ne pourrait-elle pas précisément consister en cela ?
[fulltext] =>Les psaumes fourmillent de cet étonnement, les nombreuses tonalités de leur chant sont autant d'émotions et de sentiments humains. Des tons différents qui ne concordent pas toujours parce que lorsque nous réalisons que le soir est imminent, la louange se mêle à la tristesse, la joie d'être vivant et aimé frôle l'envie de Dieu et de son aube éternelle. On ne comprend vraiment la prière sans prendre aussi en considération la souffrance qui naît du fait qu’on envie Dieu. Dans les psaumes, cette souffrance typique et paradoxale de l'homme religieux est d'autant plus terrible que dans l’humanisme biblique, la mort ne consiste pas à prolonger différemment le même vol sous l'aile de Dieu : c’est un couchant sans aube nouvelle – « Fais-tu des miracles pour les morts ? leur ombre se dresse-t-elle pour t'acclamer ? » (88,11). Il faut beaucoup d'imagination théologique pour trouver dans le Psautier, dans Qoelet ou Job des anticipations de la résurrection des morts au sens chrétien du terme. C'est dans cette absence radicale de consolation que réside le grand don de l'Ancien Testament : le fait de ne pas situer le ciel au-delà de la mort nous invite à le trouver ici-bas, là où il se trouve vraiment. Si c'est notre seul vol sous le soleil, si nous n'avons pas une seconde chance, alors notre histoire est aussi courte que sérieuse et importante. Face à l'expérience de la fugacité de la vie, la Bible sait que la vraie déception est préférable à une fausse illusion, que le désespoir peut être un bon moyen d'accès à l’existence, certainement meilleur que les consolations que nous inventons. La résurrection de Jésus a été annoncée dans un humanisme où elle ne devait pas avoir lieu, et c'est merveilleux car elle nous est annoncée par une Bible qui, jusqu'à ce "premier jour après le sabbat", ne la connaissait pas.
Le Psaume 90 est un sommet, un huit mille mètres du Psautier. Poésie et Sagesse s’y entremêlent, ainsi que Prophétie et Théologie : « D'âge en âge, Seigneur, tu as été notre refuge. Avant que naissent les montagnes, que tu enfantes la terre et le monde, de toujours à toujours, toi, tu es Dieu. Tu fais retourner l'homme à la poussière ; tu as dit : " Retournez, fils d'Adam ! " A tes yeux, mille ans sont comme hier, c'est un jour qui s'en va, une heure dans la nuit. » (Psaume 90, 1-4). Tu es pour toujours et à jamais, nous sentinelles d'une seule garde, prophètes pour une seule nuit (Isaïe 21).
Et là, dans ce bref instant, nous rencontrons vraiment Dieu, nous nous touchons vraiment. Tu nous blesses, nous te blessons, jusqu'à te clouer sur une croix. C’est ici le mystère, l'étonnement, le drame de la vie humaine : « Tu les as balayés : ce n'est qu'un songe ; dès le matin, c'est une herbe changeante : elle fleurit le matin, elle change ; le soir, elle est fanée, desséchée… nos années s'évanouissent dans un souffle. Le nombre de nos années ? Soixante-dix, quatre-vingts pour les plus vigoureux ! Leur plus grand nombre n'est que peine et misère ; elles s'enfuient, nous nous envolons. » (90, 5-10). Et le chant du deuxième Isaïe, poète de l'exil : « Une voix dit : « Proclame ! » Et je dis : « Que vais-je proclamer ? » Toute chair est comme l’herbe, toute sa grâce, comme la fleur des champs... Oui, le peuple est comme l’herbe » (Is 40, 6-7).
Le psalmiste ne connaît pas l'origine ni la racine de cette triste et éphémère condition humaine. Dans certains versets, il semble nous dire que c'est une conséquence de la culpabilité et du péché d'Adam, en faisant allusion aux premiers chapitres de la Genèse – « Enfants d'Adam, retournez à la poussière. » Un courant assurément présent dans la Bible, ce n’est pas forcément le plus brillant, même s’il est très prisé par les peuples et les temples de tous les temps. La ligne spirituelle de ce psaume est différente. C'est un texte sapientiel, une méditation sur la condition humaine, sur la façon de bien vivre notre bref passage. Nous le lisons dans l'un des versets centraux et des plus évocateurs : « Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos coeurs pénètrent la sagesse. » (90,12). La sagesse du cœur vient en apprenant à compter nos jours. Parce que savoir les compter est un don, cela peut venir d'une prière, comme l'a été la sagesse demandée par Salomon comme son seul charisme. Le psaume veut nous dire que l'art biblique de compter les jours n'est pas le décompte naturel et spontané de nos jours, qui seul ne suffit pas pour acquérir cette sagesse. L'horloge et le calendrier n’y suffisent pas non plus. Nous avons besoin d'un autre enseignement, d'une pédagogie, de quelqu'un qui nous révèle quelque chose que nous ne savons pas faire par nous-mêmes.
Parce que l'histoire de l'humanité montre surtout des erreurs en ce domaine. Nous comptons mal nos jours lorsque jeunes ils nous apparaisent infinis et que la mort ne concerne que les autres ; nous les comptons mal lorsque, devenus vieux, la pespective de notre fin prochaine nous empêche de bien vivre le jour qui nous est donné ; et nous les comptons encore plus mal lorsque, grisés par la richesse et le pouvoir, nous nous croyons invincibles et immortels en nous répétant : « Alors je me dirai à moi-même : Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition, pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. » (Lc 12, 19).
L'art de compter nos jours est un exercice spirituel aussi rare qu'essentiel. La première leçon de cet apprentissage est l'évidence d'un grand gâchis : l’impression forte et vraie d'avoir mis nos énergies là où il ne fallait pas… à quoi s’ajoute la certitude que nos jours se sont envolés et que notre vie est restée au point mort. Le psalmiste aura reçu et appris cette première leçon. Car s'il a prié pour avoir la sagesse de compter ses jours, ce don l’avait déjà rejoint - le premier (et peut-être le seul) cadeau de la prière est la conscience d'avoir besoin de ce que nous demandons, donc la prière obtient ce qu'elle demande au moment où elle débute : commencer une prière c’est déjà recevoir une grâce.
Mais le psalmiste ne s'est pas arrêté à la première leçon. Nous lisons dans le verset qui suit immédiatement : « Rassasie-nous de ton amour au matin, que nous passions nos jours dans la joie et les chants. » (90, 14). Voici la deuxième leçon de sagesse : alors que nous comprenons que nous avons mal compté nos jours, que nous ne les avons même pas vus passer, une nouvelle prière différente s'épanouit. La tristesse née de nos jours gaspillés se dissipe, la douleur due aux mauvais comptes d'hier disparaît, et une nouvelle faim se fait sentir : « Satisfais-moi maintenant avec ta grâce-amour-fidélité (hesed). Satisfais-moi le matin, et à partir d'aujourd'hui, ce ne sera plus que le matin : le matin de Dieu. » Quelque chose de semblable naît de la joie paradoxale que Qoelet trouve au-delà de l'illusion combattue avec la déception : « Voilà donc ce que moi j’ai vu : c’est chose belle et bonne, pour quelqu’un, de manger et de boire, de trouver son bonheur dans toute la peine qu’il se donne sous le soleil pendant les jours que Dieu lui accorde. Telle est la part qui lui revient » (Qo 5, 17).
Très belle la lecture du dernier verset du Psaume, il nous remplit d'espoir: «Consolide pour nous l'ouvrage de nos mains ; oui, consolide l'ouvrage de nos mains » (94, 17). Une phrase répétée deux fois, qui rappelle les répons liturgiques des choeurs – « notre travail, notre travail ; consolide, consolide. » Il est surprenant qu'à la fin de ce poème, de cette profonde méditation sur la condition humaine, nous trouvions l'œuvre de nos mains au terme d'un psaume qui révélait la fugacité de notre vie et priait pour demander la sagesse du cœur. Nous trouvons donc le travail. Peut-être parce que ce nouveau matin arrive presque toujours au cours des mêmes jours, dans l’accomplissement du même travail, dans la même famille, dans la même communauté de toujours. C'est un nouveau matin qui trouve Sisyphe dans le même exercice : en train de pousser le même rocher vers la même montagne. Quand ce héros tragique que nous sommes prend enfin conscience de son destin, il remercie son rocher parce qu'il comprend que c'est ce rocher qui l'a poussé chaque matin vers le sommet. Nous apprenons à bien compter les jours lorsque, un matin, nous retournons au bureau et que plongés dans les mêmes dossiers de toujours, entourés des mêmes collègues, nous percevons que notre bureau a la même vibration que l'univers, que nous voyons dans le mouvement de notre tournevis le reflet même du geste ordonnateur d'Élohim au petit matin de la création.
Le Psaume 90 est le seul que le Psautier attribue à Moïse : « Psaume de Moïse, homme de Dieu » (90,1). Nous ne savons pas à quel moment de la vie de Moïse l’auteur sacré l'a imaginé en train de composer ce chant. Pour certains, sur le Mont Nébo, à la fin de sa vie, hors de la terre promise, attendant le baiser de Dieu sur sa bouche. C’est peut-être le cas, on ne sait pas. J'aime imaginer Moïse de en train chanter les derniers versets de cette hymne à la vie alors qu'il bénit et loue le travail des artisans qui ont construit l'Arche (Exode 35). Il les regardait en priant : « Consolide l'œuvre de nos mains » et le peuple répondait : « Consolide-la. »
Qui sait, alors, si celui qui a composé ce psaume n'a pas commencé par la fin ? En terminant une de ses œuvres, il a éprouvé de la tristesse en pensant à la vanité de toutes choses, susceptible d’engloutir aussi son œuvre, cette tristesse que rencontrent ceux qui sont confrontés au caractère éphémère de la vie. Et c’est alors qu’une prière nouvelle a jailli de son coeur : « Donne de la substance à cette œuvre, afin qu'elle ne passe pas aussi comme le vent : sauve-la, même si tu ne peux pas me sauver. » C’est à partir de là, de ce SOS lancé pour protéger cette œuvre de la mer du néant, que ce poète de l'éphémère a touché l'Absolu et lui a demandé d'apprendre à compter ses jours. Et pendant qu'il faisait cette prière, il a découvert qu'il était déjà en train de bien prendre en compte un jour, celui où il achevait son travail. En travaillant, matin après matin, nous accomplissons notre oeuvre et achevons notre vol. Éphémère, très bref et stupéfiant.
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Publié sur Avvenire le 9/08/2020
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Chant soudanais des Denka
Le Psaume 90 nous rappelle que nous pouvons surmonter la fugacité de l'existence en accordant notre cœur avec celui de l'univers. Et ensuite continuer chaque matin notre travail.
À l'origine de la vie spirituelle, il y a l'expérience de l'absolu. Une expérience rare qui peut se produire à tout âge : nous réalisons que nous ne sommes qu'un grain de sable dans l’infini de l’océan, que cet océan a un sens, tout comme nous-même, et que ce sens est le même. Si l’expérience philosophique commence par l’étonnement d’être-au-monde, la vie spirituelle commence par ce prodigieux sens unique à double sens : nous prenons conscience d’être un papillon éphémère, d’être nés pour voler un jour, mais l’ivresse de ce "vol fou" est la même que celle de l'univers. La photographie qui fixe un seul instant peut être aussi belle que le plus beau film, et même plus lumineuse. Notre temps est un moment, mais il a la même qualité que celui de Dieu. Tout comme l'absolu est entré dans notre temps, nous sommes entrés dans le sien, et nous participons du même temps. Lorsque nous parvenons à accorder notre cœur avec celui de l'univers, nous ressentons le même battement, nous découvrons que tous deux palpitent à l'unisson – et la prière ne pourrait-elle pas précisément consister en cela ?
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 02/08/2020
« Seule la parole de l'homme en réponse à la parole de Dieu, qui est par essence un "non", atteste la liberté humaine. C'est pourquoi la liberté de dire non est le fondement de l'histoire. »
Jacob Taubes, l'eschatologie occidentale
L'exil est le moment où, assis sur les ruines de la "première promesse", nous pouvons demander à Dieu et à nous-mêmes de devenir plus grands que la réciprocité.
La réciprocité est la bénédiction et la malédiction de nos alliances et de nos promesses. Nous sommes pétris de réciprocité, nous la désirons et l'espérons à la suite de nos cadeaux, nous l'attendons sous forme d'estime après avoir livré l'œuvre de notre travail, et aucun amour ne peut s'épanouir pleinement si, à un moment donné, il ne devient pas réciproque. Lorsque le christianisme a voulu résumer le message de Jésus en une seule loi, il n'a rien trouvé de mieux qu'un commandement de réciprocité – « Aimez-vous les uns les autres. » Dans l'humanisme chrétien, l'amour reste imparfait tant qu'il ne suscite pas un autre amour en retour. L’agapè, dans son devoir d'être, c'est aimer et être aimé. Cette réciprocité se trouve inscrite, de manière indélébile, au cœur des personnes et de la communauté, elle engendre un besoin radical de gratitude et de reconnaissance, et donc d'attente et de réciprocité qui frôlent la prétention. Nous ne contrôlons pas l'estime des autres ni leur gratitude, mais sans elle, nous nous sentons incomplets, insatisfaits et inachevés.
[fulltext] =>Nombre de malheurs, de frustrations et même de violences se jouent aux confins du désir et de l'attente, de l'espoir et la requête, de la liberté et de l'obligation : il apprend bien le métier de vivre celui qui, après avoir pratiqué toute sa vie l’art de la réciprocité, après l'avoir aimée et comprise infiniment comme le pain et l'eau des relations importantes arrive un jour à apprendre à aller au-delà de la réciprocité, à vivre même sans ce pain ni cette eau. C’est alors le début d’une nouvelle étape, celle d'une nouvelle pauvreté, d'une douceur adulte et heureuse. Car nous comprenons que notre dignité est plus grande que la réciprocité, et qu'aucune réciprocité ne peut satisfaire notre soif et notre faim d'infini. Celles-ci nous accompagneront et iront grandissant toute notre vie. Accueillir ce peu de réciprocité comme un pur don et un émerveillement.
« L'amour du Seigneur, sans fin je le chante ; ta fidélité, je l'annonce d'âge en âge. Je le dis : C'est un amour bâti pour toujours ; ta fidélité est plus stable que les cieux. Avec mon élu, j'ai fait une alliance, j'ai juré à David, mon serviteur : J'établirai ta dynastie pour toujours, je te bâtis un trône pour la suite des âges. » (Psaume 89.2-5).
Le début du psaume rappelle un rite nuptial, ou une alliance entre deux peuples, où chacun exprime sa promesse et construit l'alliance comme la rencontre de deux êtres "pour toujours". Puis, au nom du peuple, s'élève l'hymne de l'amour : « Que les cieux rendent grâce pour ta merveille, Seigneur, et l'assemblée des saints, pour ta fidélité.... Heureux le peuple qui sait t'acclamer. » (89, 6-17). Le Psaume rappelle ensuite à Dieu sa promesse : « Autrefois, tu as parlé à tes amis, dans une vision tu leur as dit : "J'ai donné mon appui à un homme d'élite, j'ai choisi dans ce peuple un jeune homme. J'ai trouvé David, mon serviteur, je l'ai sacré avec mon huile sainte… je fonderai sa dynastie pour toujours, son trône aussi durable que les cieux, mais sans lui retirer mon amour, ni démentir ma fidélité. Jamais je ne violerai mon alliance, ne changerai un mot de mes paroles." » (89, 20-36). Des mots semblables à ceux qu’on trouve dans la bouche du prophète Nathan dans le deuxième livre de Samuel (chap. 7), dont le psalmiste s'est peut-être inspiré, ainsi que les poèmes babyloniens (dont l’ Enuma Elis).
Et c'est ici, précisément au verset 39, qu’on touche le cœur du psaume. Lorsque, après avoir redéclaré son amour et rappelé à Dieu le sien, l’adverbe d’opposition "pourtant" opère un basculement du poème et en révèle le sens : « Pourtant toi tu l'as méprisé, rejeté ; tu t'es emporté contre ton messie. Tu as brisé l'alliance avec ton serviteur, jeté à terre et profané sa couronne...Tu as mis fin à sa splendeur, jeté à terre son trône ; tu as écourté le temps de sa jeunesse et déversé sur lui la honte. » (89, 39-46). Tel est l'exil, le rocher contre lequel s’est brisée l'histoire du salut, la vaine fumée qui a enveloppé la promesse, l'épée qui a rompu le pacte de réciprocité. Un Psaume composé à Babylone, lors de la grande épreuve où le peuple d’Israël était presque certain que son Dieu avait oublié l'Alliance. Les prophètes ont vu dans l'exil une conséquence logique de l'infidélité du peuple – ce qui nous rappelle qu'il est toujours très difficile de traverser nos exils et d'en sortir l'âme innocente Mais au beau milieu ces décombres a surgi la plus sublime prière de la Bible, Israël a appris à prier différemment.
Les mots qui forment l'épine dorsale du chant sont hesed et emét. Hesed est une dimension de l'amour qui rappelle particulièrement la loyauté dans les relations durables. C'est l'amour loyal, qui se rapproche donc de la fidélité et de la fiabilité, c'est-à-dire de l'emét. Emét fait référence à la vérité et à la fidélité, et a la même racine que aman (croire), emunah (foi) et amen (c'est vrai, je crois), le mot par lequel ce psaume se termine. À la base de emét, il y a une idée de solidité, de vérité comme preuve, de "soutien" (qui est le premier sens du verbe "aman"). Un sens caché également dans l'alphabet hébreu : emét est composé de trois lettres reposant chacune fermement sur deux "jambes", tandis que le mot "faux", seqer repose sur un seul point, bancal, est instable. Il s'agit de la foi biblique qui, contrairement à la foi grecque puis à celle des Lumières, n'est pas un acte cognitif de la raison visant à croire en des principes ou des idées mais la prise en compte d'une réalité qui présente la preuve d’une vérité évidente, intrinsèque et concrète. Les mains et les pieds sont les premiers instruments de cette foi.
Le chevauchement de ces deux mots, qui se déplacent dans le périmètre sémantique de vérité-foi- fidélité- loyauté, est la clé pour entrer dans le secret de ce psaume. Le psalmiste demande à son Dieu, qui est le Dieu de l'alliance et donc le Dieu du pacte de réciprocité, d'être plus grand que la réciprocité. Et la possibilité de cette opération paradoxale réside avant tout dans la sémantique de ce mot magnifique, emét, qui signifie à la fois vérité et fidélité. Ce "souviens-toi de toi-même" si fréquent dans les psaumes se présente à nouveau. Lorsqu'on est assis sur les décombres du passé, au temps de l'échec et du malheur, la première prière n'est plus celle des temps ordinaires : "Dieu souviens-toi de moi". Dans les étapes difficiles, l'exercice de la mémoire devient radical et stupéfiant. L'homme fait appel à la ressource de dernière instance et ose dire à Dieu : "Souviens-toi de toi-même", souviens-toi de qui tu es. Et la plus belle prière naît, celle que nous disons à Dieu mais aussi celle que nous nous disons lorsque, assis sur le tas d'ordures de ce qui reste de nos pactes, nous trouvons encore la force d'une dernière requête : « Souviens-toi de qui tu étais, souviens-toi de qui tu es. » La fidélité à un pacte a donc sa racine et sa raison d'être dans la vérité. Une expression semblable qui peut être lue dans d'autres psaumes est : «Par amour de de ton nom. » Comme pour dire : « Toi, YHWH, tu n’es pas comme nous, qui sommes liés et emprisonnés dans la loi de réciprocité qui conditionne nos pactes. Tu es plus grand parce que tu es capable de continuer à être fidèle à un pacte même lorsque nous le trahissons, tu es le vrai Dieu parce que tu es aussi libre de toute réciprocité. Pour cela, tu dois être fidèle à ton nom, tu dois être fidèle à ton "pour toujours" précisément et parce que nous ne le sommes plus. Sois plus grand que la liberté que tu nous as donnée. » Et c'est ainsi, en répétant ces prières, que nous avons nous aussi appris à prononcer nos "pour toujours". En rappelant à Dieu son "pour toujours", nous sommes devenus capables de le dire aussi. Et ainsi nous avons appris le pardon, nous avons aussi appris une fidélité plus grande par amour de "notre nom", une mystérieuse vraie fidélité envers nous-mêmes qui nous a rendus, parfois, meilleurs que nos réciprocités.
Au cours des siècles, ce psaume a été récité par de nombreux hommes et femmes qui, face aux décombres de la vie adulte, ont rappelé à Dieu la vérité de la première alliance et de la première vocation ; et en la rappelant à Dieu, ils se la sont rappelée eux-mêmes, dans une nouvelle expérience de réciprocité – à l’âge adulte, cette vérité-fidélité à notre "nom" ne peut renaître que si quelqu'un d'autre nous la rappelle. Nous savons qu'au début, il y a eu une voix authentique, un appel et une alliance. Nous avons répondu avec générosité, nous avons cru à cette vérité sans pareille. Et nous avons commencé notre voyage, nous avons pris de la poussière en chemin, et un jour nous nous sommes retrouvés en exil dans un pays étranger, même si nous n'avons jamais quitté une maison ou un couvent. On attein l’âge adulte dans le parcours d’une vocation quand on arrive à comprendre que la vie que l'on est en train de mener n'est pas celle que l'on voulait vivre, et que s’installe en nous un profond sentiment d'infidélité , une infidélité qui n'est pas une trahison mais qui révèle l’authenticité de la première voix. Parfois, le long de ces rivières, il nous arrive aussi de crier à Dieu "souviens-toi de toi", pour lui dire : « Je n'ai pas réussi à garder la fidélité de la première alliance, mais tu dois être fidèle. Et si tu es fidèle à l'alliance avec moi, je ne manque de rien, c'est une bonne façon de vieillir et de mourir. » Si la foi est aussi une corde (fides), alors on continue l'escalade et on ne tombe pas tant que l'un des deux ne lâche pas prise.
La conclusion du psaume est très belle et mystérieuse, son dernier "souviens-toi" : « Rappelle-toi, Seigneur : je porte dans mes entrailles la honte des peuples. » (89, 51). Comment ne pas voir ici un écho du chant du serviteur d'Isaïe ! (« Pourtant il s’est chargé de nos souffrances, il a pris sur lui nos douleurs »: 53,4). Le poète devient dans ses entrailles (in sinu) l'image du peuple souffrant, exilé, humilié. Le commentaire que fait Guido Ceronetti de ce verset est très beau : « S'il y a un principe unificateur qui n'est pas d'invention théologique, c'est ce déshonneur qui nous unit. Mais dans ce texte, c'est aussi l'Écriture elle-même qui parle, et dit d'elle-même, avec une impudeur implacable et sacrée, ce qu'elle a porté du monde et dans le monde » (Le Livre des Psaumes, p. 274).
Toutes les entrailles des serviteurs et des servantes souffrants de l'histoire ont été le lieu où a mûri une semence différente, qui un jour a été recueillie dans le sein d'une vierge. Le « Réjouis-toi, ô Marie » est la réponse aux nombreux « Ô Dieu, souviens-toi! »
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par Luigino Bruni
Publié sur Avvenire le 02/08/2020
« Seule la parole de l'homme en réponse à la parole de Dieu, qui est par essence un "non", atteste la liberté humaine. C'est pourquoi la liberté de dire non est le fondement de l'histoire. »
Jacob Taubes, l'eschatologie occidentale
L'exil est le moment où, assis sur les ruines de la "première promesse", nous pouvons demander à Dieu et à nous-mêmes de devenir plus grands que la réciprocité.
La réciprocité est la bénédiction et la malédiction de nos alliances et de nos promesses. Nous sommes pétris de réciprocité, nous la désirons et l'espérons à la suite de nos cadeaux, nous l'attendons sous forme d'estime après avoir livré l'œuvre de notre travail, et aucun amour ne peut s'épanouir pleinement si, à un moment donné, il ne devient pas réciproque. Lorsque le christianisme a voulu résumer le message de Jésus en une seule loi, il n'a rien trouvé de mieux qu'un commandement de réciprocité – « Aimez-vous les uns les autres. » Dans l'humanisme chrétien, l'amour reste imparfait tant qu'il ne suscite pas un autre amour en retour. L’agapè, dans son devoir d'être, c'est aimer et être aimé. Cette réciprocité se trouve inscrite, de manière indélébile, au cœur des personnes et de la communauté, elle engendre un besoin radical de gratitude et de reconnaissance, et donc d'attente et de réciprocité qui frôlent la prétention. Nous ne contrôlons pas l'estime des autres ni leur gratitude, mais sans elle, nous nous sentons incomplets, insatisfaits et inachevés.
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